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Dans la joie et l’allégresse : trois adresses sous le signe des huîtres

Michel Verlinden
08/12/2022

Produit festif par excellence, l’huître ravit les amateurs. La plupart du temps, hélas, c’est sans respecter et connaître ce mollusque qu’on le déguste. Pas chez Liesse.

Quiconque à Bruxelles éprouve une envie d’huîtres aura le réflexe de se diriger vers l’une des adresses consacrées en la matière, à savoir ces grandes brasseries dédiées à la mer. Logique, celles-ci se targuent d’un banc d’écailler en bonne et due forme. Pour ce qui est de notre expérience personnelle – il faut préciser que l’on ne prétend pas avoir testé tous les établissements de ce créneau – la satisfaction a rarement été de mise.

Il faut avouer que nos attentes sont élevées. En (Fine de) clair(e), ce que l’on recherche, c’est le conseil d’un véritable sommelier du bivalve capable de recommander les « meroirs » – équivalents aquatiques du terroir – au plus proches des papilles du client.

En lieu et place, nous n’avons jamais été confronté à rien de plus que… des ouvreurs d’huîtres, même si ceux-ci étaient sympathiques, le test ultime en la matière consiste à lancer la conversation sur la question des « diploïdes » et des « triploïdes ». Bien sûr, si la réponse est « diplo, quoi ? », il ne faut pas en déduire que les mollusques vendus sont mauvais.

En revanche, il y a tout lieu de croire que la passion et le savoir ne sont pas au rendez-vous. Outre connaître cette différence essentielle entre des huîtres rendues à 80% stériles par manipulation chromosomique (les triploïdes) et des huîtres en phase avec les cycles naturels (diploïdes), un bon écailler doit être capable de citer les sept bassins ostréicoles français, être au courant des variétés (spéciales, claires, vertes…) et assortir les calibrages avec les envies de la clientèle. Que faire quand cette expertise n’est pas au rendez-vous ?

Heureusement, Bruxelles fait place à une nouvelle génération de chefs qui bousculent les codes de la gastronomie. Dans le cas qui nous occupe, à la place de proposer un assortiment spectaculaire mis en valeur sur glace – une hérésie en soi qui bloque les saveurs du produit – ces adresses font le choix d’une offre ultra-limitée mais à la fraîcheur et à la qualité impressionnantes.

Nouvelle vague
L’un des meilleurs exemples en la matière est donné par Liesse, adresse que l’on doit entre autres à Pierre Millour, repéré au bar à cocktails Chez Ta Mère – un lieu prisé pour ses dégustations hebdomadaires nommées « Jeud’huître ». Le plus pour cette enseigne étroite – une petite trentaine de couverts – qui aurait dû être un snack à Bánh mì au départ ? Une connexion directe avec un ostréiculteur breton, situé dans le bassin du Pô à Carnac (Morbihan), portant le nom de Les Perles de Yuna.

« Les huîtres sont mises en bourriches le mardi après-midi et elles me sont livrées dans la nuit du mardi au mercredi », explique Millour. D’abord, on aime qu’elles soient issues de la pratique traditionnelle, le « captage », qui consiste à récolter les naissains en pleine mer. Ces huîtres sont donc issues d’une procréation dans le milieu naturel, au contraire de la reproduction en écloseries. Diploïdes, ces mollusques le sont assurément. L’intérêt ? Un respect du vivant qui évite la densification des zones de production et, partant, des déséquilibres environnementaux – il est intéressant de savoir que de nombreux élevages font face à des mortalités massives, notamment en raison d’agents infectieux.

Quid de la dégustation ? L’assiette (15 euros) aligne 6 huîtres creuses de calibre 4, soit le format bistro consacré. Elle est escortée d’un pain à tomber venant de l’excellente boulangerie Khobz. En accompagnement, un quart de citron et une petite vinaigrette à l’échalote, un condiment plaisant pour qui veut altérer l’expérience. C’est sans citron, ni poivre, ni vinaigre, que l’on choisit de savourer les huîtres. En bouche, on pointe une grande naturalité, saline et iodée, tempérée par une chair contenue qui ne sature pas les papilles. Le tout est accompagné d’un Muscadet Sèvre et Maine « Bohale » (6 euros) dont la belle longueur et le caractère floral font mouche.

Liesse Adolphe Demeurlaan 57 avenue Adolphe Demeur, Sint-Gillis/ Saint-Gilles, @liesse.bxl, di/ma/Tu > za/sa/Sa 17 > 0.00

Trou normand

Autre adresse à faire bouger les lignes, ce « snack de terroir » invite Marseille à Bruxelles. Non sans faire un détour par la Normandie puisque Delphine Auffret y propose les huîtres du Père Gus. On aime l’approche de l’ostréiculteur Jean Rouvière qui collecte les naissains en Charente-Maritime pour les ramener ensuite dans la Manche.

L’élevage qui s’effectue en pleine mer dure 3 ans et est prolongé par un affinage dans des bassins peu profonds appelés « claires ». Côté boisson, le Bain des Dames fait la part belle aux étiquettes naturelles – dont les excellents vins espagnols du domaine Partida Creus -, sans négliger les bières locales (Cantillon, Brasserie de l’Ermitage…) et les eaux-de-vie. Pour dénicher le bon accord avec l’iode, ne pas hésiter à se tourner vers la patronne qui connaît ses flacons sur le bout des doigts.

Le Bain des Dames Vleurgatsesteenweg 186 chaussée de Vleurgat, Elsene/Ixelles, 02-512.67.26, wo/me/We > zo/di/Su 18 > 0.00

Perle rare

Vous habitez du côté de Schaerbeek et vous voudriez goûter les huîtres bretonnes « Perles de Yuna » ? Ne bougez pas. Pendant tout le mois de décembre Le Wappers programme des dégustations le mercredi – la soupe au poisson est également au menu. Pour rappel, cette enseigne a été ouverte par l’un des brasseurs les plus intéressants de la capitale, Bernard Leboucq de la Brasserie de la Senne – les amateurs se réjouiront de voir couler Zinnebir, Jambe de Bois et Zenne Pils au fût.

Côté accord vin, cette adresse sans façon propose du Prosecco Isola Augusta, en blanc ou en rosé. Tout le monde n’aime pas les huîtres ? Si les délicieux croque-monsieur au grill ne sont plus à la carte, deux plats de pâtes font amplement le boulot : un spaghetti carbonara (garanti sans crème) et un cacio e pepe.

Le Wappers Wapperstraat 7 place Wappers, Schaarbeek/Schaerbeek, 02-732.32.07, di/ma/Tu > do/je/Th 16 > 0.00 & vr/ve/Fr 16 > 1.00

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