(© Heleen Rodiers)

Chaque semaine, AGENDA part à la recherche des images et des sons de Bruxelles. Ghalia Benali oscille entre deux cultures : l’européenne, qui lui a donné sa liberté, et l’arabe, source d’inspiration inépuisable.

Ghalia Benali habite juste derrière le parc Josaphat, un havre paisible et verdoyant en plein Schaerbeek. « Avec le parc juste en face, je sors le chien ou je vais m’y balader alors que ce n’était pas dans ma culture », raconte la chanteuse belgo-tunisienne. « Chez nous tout est ouvert, on ne prend pas de rendez-vous avec la nature. Une maman n’emmène pas son enfant dans un parc pour prendre l’air ».
Ghalia Benali a pourtant bien choisi ce côté de la ville pour son parc et sa beauté. « À Schaerbeek, on peut découvrir le riche passé architectural de la Belgique. J’aime la disposition des maisons, les styles... C’est très varié d’une rue à l’autre, on peut voyager d’un monde à un autre, on va du blanc belge local au quartier turc ou marocain. Je trouve mon bonheur dans le hammam de la rue de Brabant et c’est de là que viennent les tissus que j’utilise dans mes costumes ou pour décorer la scène. Puis il y a les magasins, les cafés, une vraie vie le dimanche qui attire aussi les Italiens, les Espagnols, les Suédois, les Suisses ou les Français. Il y a de tout à Schaerbeek, c’est un petit concentré de Bruxelles ».
Le fait de vivre dans une commune si riche en diversité est primordial pour la chanteuse car c’est du quotidien qu’elle s’inspire pour écrire ses textes et composer ses musiques. « Tout ce que j’exprime vient de la vie, des gens que je côtoie. Cet été, il y avait un petit festival dans un parc, j’ai entendu des chants turcs et j’ai été en enregistrer certains et prendre des notes car c’était exactement l’énergie que je voulais pour un projet ».
Quand elle nous ouvre la porte de sa belle petite maison, on croirait entrer dans un monde de rêves. Ce qui ne surprendra pas ceux qui connaissent l’artiste en Ghalia : la chanteuse est formée en graphisme, réalise ses propres costumes voire même des intérieurs (comme ce qui reste de la grande salle du Bazaar, où elle avait magnifiquement décoré le restaurant). Ses créations entre art graphique, collage et dessin deviennent des pochettes d’albums, des cartes postales ou même des livres.
« En entrant ici, j’ai pensé à la maison d’Agatha Christie », explique-t-elle. « C’est la première fois que je sors plein de petites choses que j’ai trouvées un peu partout. J’adore me balader aux puces : quand un objet me plaît, me raconte une histoire, je le prends même si je ne sais pas directement quoi en faire. Je suis une passionnée de poupées, rien ne peut m’arrêter d’en acheter. (Rires) Tous ces objets se sont retrouvés entassés dans une caisse dans mon atelier. J’ai commencé à tout mettre en place, comme si la maison était un théâtre plein d’objets qui racontent une petite tranche de vie. Ça m’a donné plein d’idées, je me suis mise à écrire des histoires, à prendre des photos, à préparer une expo... »
On s’installe dans le salon, en sirotant un thé que la chanteuse vient de préparer. « Avant d’avoir mes enfants, je n’avais pas de salon. La grande pièce était mon atelier, la pièce de vie où on fait tout », explique-t-elle, tout en ajoutant que cela n’a pas tellement changé, sauf qu’aujourd’hui ses enfants ont aussi leur place pour bricoler et expérimenter dans le salon-atelier. « Le lieu dans lequel je vis, c’est le lieu dans lequel je travaille. Je n’arrive pas à dissocier les deux. Il y a des paroles que j’ai écrites pendant que je préparais à manger ».
En général, Ghalia Benali commence les répétitions par un repas. « Préparer la nourriture et manger ensemble amène les gens dans la même énergie. Après le repas, on s’installe dans la pièce à coté et on est directement connectés. Chacun peut insuffler des idées, ma musique est très libre, basée sur l’improvisation. On fixe certaines choses et on laisse d’autres espaces ouverts pour l’inspiration du moment. Un jour, Vincent Noiret (le contrebassiste qui l’accompagne, NDLR) m’a confié que depuis qu’il avait mangé de la harissa chez moi, il avait appris à jouer Oum Kalthoum », explique-t-elle en riant.
Quarante ans après sa mort, Oum Kalthoum est toujours considérée comme la plus grande chanteuse du monde arabe. En 2010, Ghalia Benali a sorti un premier album de reprises de cette grande star égyptienne, en duo avec le joueur de oud belgo-tunisien Moufadhel Adhoum. Un album qui est en train de faire fureur en Égypte (lire aussi ci-contre) et grâce auquel Ghalia Benali est plus souvent au Caire qu’à Bruxelles. Donc si vous voulez la voir, ne tardez pas à réserver vos places pour son concert chez Muziekpublique !

Bague-shilling
Ghalia Benali porte une bague faite par une amie et où figure un shilling, une vieille pièce égyptienne qui ne vaut même pas 10 cents. « On y voit les trois pyramides. Pour beaucoup d’Égyptiens, une chanteuse, c’est une diva : bien maquillée et habillée, avec des diamants... Quand ils me voient arborer une pièce de monnaie en cuivre, ils restent bouche bée ». Ghalia Benali porte cette bague depuis le début de son aventure égyptienne. « En Tunisie, on m’appelle ‘l’Européenne’. Je suis arrivée en Belgique il y a 26 ans et pendant tout ce temps je me suis sentie belge. C’est d’ailleurs à Bruxelles que j’ai découvert les vieux classiques arabes d’Égypte et au Louvre que j’ai découvert l’Égypte des pharaons. Mais depuis que j’ai vu l’Égypte de mes propres yeux, je me sens chez moi là-bas. Quand l’Égypte me manque trop, cette bague me donne l’impression d’être connectée avec ce pays ».

Commune : Schaerbeek
Album : Ghalia Benali sings Oum Kalthoum II
Concert : 27/11, 20.00, Muziekpublique, www.muziekpublique.be

Photos © Heleen Rodiers

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