Nilüfer Yanya : reine des Nuits

Nicolas Alsteen
© BRUZZ
26/04/2019

Pur produit de la génération SoundCloud, la jeune Nilüfer Yanya réinvente la pop sans se poser de questions. Consciente des contradictions de l’époque, la Londonienne cherche des solutions d’avenir au quotidien et offre de quoi se réjouir le reste du temps dans les chansons de Miss Universe, premier album aux charmes infinis à savourer aux Nuits Botanique.

En survêt dans les bureaux de sa maison de disques, Nilüfer Yanya reçoit BRUZZ en toute décontraction. À la veille de son concert aux Nuits Botanique, l’ado de Chelsea a déjà parcouru le monde en compagnie des Fleet Foxes, d’Interpol ou de Sharon Van Etten. Son premier album en poche, la petite Anglaise défend les couleurs d’une pop sans frontières. Capable de séduire des foules immenses, tout en captivant les mélomanes les plus pointilleux, Nilüfer Yanya cultive un penchant pour les voyages sans GPS. Aventureuse, elle emprunte les itinéraires bis de King Krule, la route du rock et les raccourcis électroniques. Elle ravive aussi la soul de Sade et possède – comme chez The xx ou Everything but the Girl – une voix capable de métamorphoser une mélodie minimaliste en un tube planétaire. Cette fille a donc tout pour plaire.

Sur scène, tu reprends Hey, un morceau publié par les Pixies en 1989. Tu es née en 1996, comment t’es-tu approprié ce classique du rock alternatif ?
Nilüfer Yanya : Mon prof de guitare nous faisait écouter ses groupes de rock préférés. C’était une façon de partager ses goûts et de sensibiliser ses élèves à une certaine esthétique. C’est comme ça que j’ai découvert les Pixies. Après les cours, je fonçais chez moi pour réécouter leurs morceaux sur YouTube. Le titre Hey m’a toujours scotché. Je me le passais en boucle. À force, j’avais l’impression que les Pixies l’avaient composé pour moi. J’aime la simplicité qui se dégage de la mélodie. La rythmique est parfaite, le refrain entêtant.

Pendant l’enregistrement de ton premier album, tu es partie en Grèce pour t’impliquer dans une association venant en aide aux réfugiés. Quelle est l’origine de ce projet ?
Yanya : Ma grande sœur et moi sommes à l’initiative de l’association Artists in Transit. L’idée, c’est de venir en aide aux migrants qui, désœuvrés, vagabondent dans les rues d’Athènes. Nous sommes donc parties là-bas pour mettre en place des ateliers créatifs dans les camps de réfugiés. Nous donnons des cours de dessin, de musique ou de couture. Nous réalisons des peintures et des bricolages. Ce n’est pas grand-chose, mais ça permet de créer des liens sociaux entre les gens, de les impliquer dans un projet, de leur donner un but. Désormais, de nombreux volontaires nous aident à poursuivre cette opération humanitaire.

Trouve-t-on une trace de cet engagement dans tes chansons ?
Yanya : Je ne me sens pas en droit d’exploiter l’histoire de ces gens. Aucun morceau ne fait explicitement allusion à la situation sur place. En revanche, je porte cette cause au quotidien. Donc, indirectement, j’ai l’impression de véhiculer des messages qui vont dans le sens de ce projet.

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Quelles sont tes principales sources d’inspiration ?
Yanya : Pour composer, je pars toujours d’une image précise, une représentation mentale qui s’enracine dans diverses sources d’inspiration. Les thèmes peuvent surgir au détour d’un coup de cœur littéraire ou cinématographique. Le film Victoria (de Sebastian Schipper, NDLR) par exemple, m’a beaucoup touché. Ce récit, tourné en un seul plan-séquence, retrace les aventures d’une jeune Espagnole venue s’installer à Berlin. Pendant deux heures, toutes les actions se déroulent en temps réel. Du coup, chaque instant a une fonction déterminante dans l’histoire. J’essaie d’insuffler ce rythme dans mes chansons.

En turc, ton prénom signifie « fleur de nénuphar ». As-tu déjà eu l’occasion de te produire en Turquie ?
Yanya : J’ai joué à plusieurs reprises à Istanbul et une fois à Izmir. En réalité, j’ai découvert la terre de mes ancêtres par le prisme de la musique. Grâce aux concerts, je me suis rapprochée de la famille de mon père qui, aujourd’hui encore, vit là-bas. Mon prénom vient de Turquie, mais ma mère a des racines irlandaises et barbadiennes. J’ai grandi au contact de différentes cultures. Elles me définissent, mais ne se manifestent pas ouvertement dans ma musique.

L’album s’intitule Miss Universe. Qui est-ce ?
Yanya : Tout le monde et personne à la fois. C’est une force qui nous pousse vers l’avant mais qui, en même temps, alimente nos frustrations. Au quotidien, nous sommes tous sous pression. Il faut faire les choses correctement, se montrer irréprochable pour, peut-être, avoir un sentiment d’accomplissement. Miss Universe part de cette réflexion. Nous avons tous des objectifs. Mais, dans notre société, parvenir à ses fins n’est plus nécessairement synonyme de satisfaction. Nous en sommes arrivés à un point où rien n’est jamais suffisant ou assez bien.

Miss Universe est jalonné de plusieurs interludes. Quelle est leur fonction ?
Yanya : À la fin de l’enregistrement du disque, je me suis retrouvée avec une collection de chansons dépareillées. Pour moi, ce n’était pas réellement un album, plutôt un rassemblement de morceaux dépourvus de fil rouge. Pour y remédier et donner une cohérence d’ensemble, j’ai eu l’idée d’introduire ces petites fictions en guise d’intermèdes entre les chansons. Dans mon esprit, ces saynètes créent de véritables connexions entre les différentes parties du disque.

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