Jean-Louis Trintignant et la poésie

Gilles Bechet
© Agenda Magazine
20/02/2013
Jean-Louis Trintignant préfère la scène à l’écran. Il revient, sans doute pour la dernière fois, avec un spectacle musical autour des poèmes de Boris Vian, Jacques Prévert et Robert Desnos. Trois poètes engagés dans les combats du XXe siècle, qui ont su « parler légèrement de choses graves et gravement de choses légères ».

Boris Vian a écrit : « Si les poètes étaient moins bêtes et s’ils étaient moins paresseux, ils rendraient tout le monde heureux ». Jean-Louis Trintignant, vu récemment dans Amour, n’est pas poète, mais il adore la poésie. Il n’est pas paresseux et il possède ce grain de voix si particulier, tranchant et infiniment doux, avec lequel il rend les gens heureux.

Ce spectacle rassemble trois poètes « libertaires ». Ce mot résume-t-il ce que vous attendez de la poésie ?
Jean-Louis Trintignant : C’est une forme de poésie qui me touche par cette façon de parler légèrement de choses graves et gravement de choses légères. Vian, Desnos et Prévert mêlent l’engagement et l’humour. Il y a aussi chez eux cet esprit anarchiste qu’on retrouve dans l’autodérision que vous cultivez en Belgique.

La poésie est aujourd’hui confidentielle. Est-ce important pour vous d’aller vers les gens pour la dire en public ?
Trintignant : Je pense qu’il y a plus de gens qui écrivent de la poésie que de gens qui en lisent. La musique des mots compte beaucoup dans la magie de la poésie. Le poème doit être entendu et dit à haute voix. Maintenant j’en suis certain, ce n’était pas le cas quand j’ai commencé à en lire. Dans ce spectacle, je ne lis pas les poèmes, je les vis. Ça me prend plusieurs mois avant de les apprendre complètement. Un poème, c’est très subtil. Il y a des zones d’ombre, des choses qu’on ne comprend pas. C’est une écriture très dense. C’est très difficile de fouiller au fond des mots. Quand je travaille un poème, j’ai aussi besoin de le dire aux gens autour de moi pour savoir si ça peut intéresser le public.

Comment vivez-vous la poésie au quotidien ? Avez-vous des mots qui vous accompagnent à différents moments de la journée, comme une respiration ?
Trintignant : Oui, tout à fait. C’est comme des bouts de chanson. C’est parfois une seule phrase qui me vient à l’esprit et elle me reste en tête toute la journée comme une ritournelle. Aujourd’hui, c’est une phrase de Prévert, qui n’est pas dans le spectacle : « Parle seulement des choses heureuses, des choses qui valent la peine, mais pour la peine pas la peine d’en parler ». C’est une belle phrase pour colorer la vie.

Quelle est importance de la musique ?
Trintignant : La musique et la poésie sont deux formes qui se rejoignent. Les soirs où je suis bien dans le récital, les musiciens me le disent : « Ce soir, tu étais bon dans la musique comme dans le rythme ». Pourtant, j’allais commencer le spectacle sans musique. Quand j’écoute la musique, ça me recharge. Sans, je n’arriverais sans doute pas au bout du récital. Pour moi, c’est vital. Pour le public, je ne sais pas. Il y a des gens qui adorent la poésie et qui ne supportent pas la musique. Comme Malraux.

Le théâtre, la poésie ont aujourd’hui votre préférence. C’est pour le contact direct avec le public ?
Trintignant : Quand on est sur une scène, le public nous voit travailler. Le cinéma, c’est bien, mais c’est de la conserve. Si une scène n’est pas bonne, on la refait. Au théâtre, c’est différent, chaque soir, on se met en danger. Ça fait trois ans qu’on joue ce spectacle. Chaque soir, je dis 37 poèmes, mais j’en ai préparé une cinquantaine, comme ça je peux en changer quelques-uns suivant mon humeur du jour.

Trois poètes libertaires du XXe siècle • 22 & 23/2, 20.30, €29/40/45, Wolubilis, Cours Paul-Henri Spaakpromenade 1, Sint-Lambrechts-Woluwe/Woluwe-Saint-Lambert, 02-761.60.30, www.wolubilis.be

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