Grand connaisseur de l’histoire de la tradition picturale, Marcel Berlanger s’inscrit néanmoins pleinement dans l’époque contemporaine, en utilisant notamment la fibre de verre et la peinture à la bombe. Pour cette exposition, il part d’un lieu a priori antagoniste à ce que suggère le terme «Botanique»: le reg, une forme de désert rocheux.

Le peintre bruxellois Marcel Berlanger (né en 1965) travaille toujours à partir d’images préexistantes, qu’elles soient scientifiques, tirées de journaux, de magazines de mode ou de films. Son exposition dépasse le strict périmètre du Museum du Botanique. Dans le hall d’entrée est suspendu son Aérolite, rocher en suspension dans le vide, un motif récurrent chez Magritte. Dans les serres, au niveau de la Rotonde, c’est l’actrice britannique Naomi Watts qui flotte dans les airs, cheveux mouillés, égarée dans la jungle, figée dans la stupeur. Tiré du King Kong réalisé par Peter Jackson, ce portrait a rappelé au peintre le tableau La jeune orpheline de Delacroix et la Méduse du Caravage. Le visage de Naomi Watts est ici traité en rouge bordeaux, percé de trous parfaitement circulaires et enchâssé dans un lightbox, comme une enseigne publicitaire rétro-éclairée mais ici dépourvue de fond. « Pendant la journée », explique l’artiste, « c’est l’ambiance lumineuse de la serre qui gagne. Entre chien et loup, il y un combat entre la lumière artificielle et la lumière naturelle. Le soir, l’œuvre propulse sa lumière vers la ville ».
Dans l’espace du Museum, on retrouve le rocher de Magritte, démultiplié, et un certain côté exotique. Avec cette fois en lieu et place de la luxuriance de la jungle, les étendues désertiques du reg.

Marcel Berlanger: Opuntia (2011) & Red Texas (2011)

D’où est venu ce thème du reg
?
Marcel Berlanger
: En observant l’espace du Museum, j’ai pensé à une pièce centrale, un sol, une peinture horizontale. Je suis parti d’une image scientifique : la photo d’un terrain exploré par l’Hominid Gang, un groupe d’archéologues kenyans qui recherche des fossiles humains. J’avais déjà travaillé sur des images de désert, mais celle-ci est très différente parce qu’elle est vue du dessus. Dans cette image, je ne sais pas ce qu’il y a à voir et je reproduis.
Et pour reproduire, vous utilisez la technique de «
la mise au carreau».
Berlanger
: C’est une technique traditionnelle qui permet d’agrandir en utilisant un quadrillage. Mais pour moi, c’est plus qu’une technique : en fixant une espèce de programme, ça permet de peindre sans réfléchir. On travaille dans des petites parties, abstraites. C’est un exercice de va-et-vient entre le détail, l’abstraction que constitue un carreau et l’ensemble.
Ce qui est particulier chez vous, c’est que ces carreaux restent visibles dans l’œuvre terminée. Le quadrillage n’est pas effacé partout, certains carreaux sont vides...
Berlanger
: C’est important parce que ça montre bien le processus de réalisation. C’est une manière d’assumer une position picturale, de garder des traces de tout le procédé. La peinture doit rester un fait, un événement. Je pense que ce sont justement tous ces éléments de procédure qui font qu’il y a quelque chose de frais pour le spectateur, comme si le tableau se constituait sous ses yeux. Il y a un dosage à trouver entre l’avènement du sujet et la restitution de la peinture. Ce sont deux moments qui doivent s’équilibrer. La peinture en spray juxtaposée aux images remplit la même fonction : on ne sait pas très bien si on doit regarder l’image ou le spray. L’un parasite l’autre. C’est un exercice de perception.
La peinture en spray donne aussi à vos œuvres un côté très contemporain.
Berlanger
: C’est un outil qui permet de tracer en faisant un geste, sans avoir de résistance de support. C’est idéal pour travailler sur la fibre de verre, qu’il faut beaucoup charger en peinture quand on travaille au pinceau. Le spray a en même temps une histoire longue et courte. Il cite évidemment la peinture totalement contemporaine, mais c’est aussi la plus ancienne des peintures. Pour peindre sur les parois des cavernes, les hommes ont inventé la peinture soufflée : le pigment était projeté par le souffle sur la roche, pour dessiner par exemple le contour d’une main.
Ce qui frappe aussi, c’est que vous trouez certaines de vos œuvres.
Berlanger
: Grâce à ces trous surgit tout à coup dans l’image quelque chose du contexte. On voit ce qu’il y a derrière. On est alors dans une relation de perméabilité et de surprise permanente. Quand on bouge, l’image change. Dans les portraits, ces trous sont souvent vus comme une transgression parce qu’il y a une espèce d’identification avec le sujet. Alors que si je perce des trous dans une surface noire, tout le monde s’en fout... L’image est un élément de projection, toujours. J’aime aussi cette idée que, par ce trou, le manque, l’absence prend une importance presque plus grande que la matérialité de toute image peinte.
Dans cette exposition, vous invitez un jeune artiste, Jonathan De Winter, qui a été votre élève à l’ERG.
Berlanger
: J’adore son travail. C’est une forme d’énergie très différente. Jonathan développe une sorte d’esthétique de terrain vague, avec des sculptures de pneus qui sont aussi des objets sonores. C’était intéressant dans le contexte du Botanique, un lieu qui promotionne le son. Sa sculpture posée sur mon désert transforme ma peinture en fond, en décor.
Marcel Berlanger: Mars (2009) & Mars sombre (2010)
Dans le texte: Barbarie (2011)

Marcel Berlanger: Reg
> 22/4
• wo/me/We > zo/di/Su 12 > 20.00, €2/3/4/5
BOTANIQUE Koningsstraat 236 rue Royale, Sint-Joost-ten-Node/Saint-Josse-ten-Noode,
02-218.37.32, www.botanique.be

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