Françoiz Breut : déclaration d’amour à Bruxelles

Nicolas Alsteen
© Agenda Magazine
17/10/2012
Toujours installée à Bruxelles, Françoiz Breut pose ses lèvres sur des textes passionnants. Emballées avec soin sous le dessin de La chirurgie des sentiments, les chansons de son nouvel album empruntent les codes de la pop moderne pour mieux faire chavirer les cœurs: une opération séduction réussie. Sans tension ni anesthésie.

C’est le hasard des rencontres qui nous a amené à côtoyer Françoiz Breut. La première fois qu’on a croisé l’artiste, elle tenait la main de Dominique A. Pas du genre à serrer les doigts de n’importe qui, le chanteur français a révélé une voix, une personnalité, un nom dont l’histoire retiendra les chansons. Françoiz Breut est née les pieds dans l’eau, de l’autre côté de la frontière, à Cherbourg. Depuis, elle a pris la mer, voyagé vers d’autres continents et exploré de nouvelles contrées. Un jour, ses mots se sont même aventurés dans les profondeurs du désert américain. Là-bas, en Arizona, elle a croisé les mélodies mariachis de Calexico. De retour en Europe, elle a prêté son chant de sirène à quelques musiciens (Yann Tiersen, Frànçois & The Atlas Mountains) fascinés par sa façon d’imaginer la chanson autrement. Comme dans un rêve éveillé ou un conte d’enfants pour les grands. Arrimée depuis quelques années à Bruxelles, Françoiz Breut se partage désormais entre musique et illustration. Elle est définitivement passée à l’heure belge. « Ne me demande pas comment j’ai pris racine sur tes pavés détrempés », chante-t-elle dès l’entame de son nouvel album. La chirurgie des sentiments parle de son rapport à notre capitale, de la vie sous la pluie et d’histoires de cœur qui font battre nos oreilles. Difficile de rester insensible aux charmes de ces ritournelles éternelles.

Le premier morceau de votre nouvel album s’intitule BXL Bleuette. Peut-on interpréter cette chanson comme un hommage à Bruxelles ?
Françoiz Breut : Tout à fait. C’est même une déclaration d’amour à Bruxelles. Je m’y sens tellement bien... Dans la chanson, je m’attache à décrire des endroits qui tendent aujourd’hui à disparaître. En douze ans, la ville a beaucoup changé. Elle commence à se lisser. Dans certains quartiers, on frôle l’aseptisation générale. Quand je suis arrivée, en 1993, j’étais confrontée à l’étrangeté au quotidien. Au début, je trouvais ça glauque. Et puis, je me suis habituée, je suis tombée sous le charme des lieux. Et de la météo (Sourire).

Au vu de son titre, le nouvel album laissait présager des textes sensibles et émotionnels. À l’écoute, les sujets sont plutôt légers. C’est quoi exactement La chirurgie des sentiments ?
Breut : Les sujets abordés sont variés. Je n’ai pas cherché à rassembler les chansons sous un thème commun. Ça n’aurait eu aucun sens. L’intitulé de ce disque est assez instinctif. Il n’y a pas de grandes histoires cachées derrière ce choix. Plusieurs idées ont germé en cours de route, mais rien ne semblait coller parfaitement. Chez moi, le choix du titre est toujours une étape relativement casse-tête. La chirurgie des sentiments, c’est une façon de mettre le cœur au centre de nos vies. Souvent, il nous joue des tours. On a beau être cartésien, laisser parler la raison, bien souvent, c’est le cœur qui l’emporte. C’est lui qui guide nos décisions. On peut lire le titre sous cet angle.

Y a-t-il des artistes ou des groupes qui, directement ou indirectement, ont influencé vos nouvelles chansons ?
Breut : J’ai énormément écouté les disques de The Whitest Boy Alive, le projet électro-pop d’Erlend Øye (Kings of Convenience). Cela ne s’entend pas forcément sur l’album ! (Rires) Je suis également revenue sur les chansons de José González, Astrud Gilberto et Gonjasufi. Ce sont des influences assez éclatées. Pourtant, elles ont quelque chose en commun : ce sont des musiques artisanales, bricolées, qui s’approprient les accidents de parcours et les imprévus. J’aime quand rien n’est calculé. La chirurgie des sentiments est né dans cet état d’esprit. J’ai tout composé dans l’instant en compagnie de Stéphane Daubersy (chanteur et guitariste du groupe Mièle, avec elle sur la photo, NDLR). On n’avait aucun plan d’action. On a simplement procédé par échanges d’idées. Hyper spontanément.
Le public vous a souvent perçue comme une grande interprète. Cette fois, on vous retrouve à l’écriture et la composition de toutes les chansons de La chirurgie des sentiments. Chanter les textes des autres, c’est fini ?
Breut : Cela faisait un moment que j’avais envie d’écrire des textes et de les confronter à ma musique. Je suis passée à l’acte quand j’ai réalisé qu’écrire une chanson, ce n’était pas forcément de la grande littérature. L’important, ça reste de s’amuser et de s’épanouir. Avec le temps, je ne me retrouvais plus à travers les textes que certains paroliers m’envoyaient. Ça ressemblait de plus en plus à une caricature de mes anciennes chansons. Aujourd’hui, je me sens libre de tout essayer.

La pochette de cet album est illustrée par un de vos dessins. C’était un moyen de concilier vos deux passions : musique et illustration ?
Breut : Au départ, je pensais demander à quelqu’un de travailler sur le visuel de l’album. Mais les délais sont venus compliquer les choses… J’ai donc pris ça en charge. J’ai adapté une photo dégotée dans un vieux magazine. Sans chercher à associer ma musique à mes dessins.

Votre carrière est jalonnée de prestigieuses collaborations. On ne compte plus les artistes (Calexico, Frànçois & The Atlas Mountains, Yann Tiersen, Louise Attaque...) qui sollicitent votre voix sur leurs albums. Vous n’avez jamais pensé à leur demander de renvoyer l’ascenseur ?
Breut : Il m’arrive d’y penser, mais je ne l’ai jamais fait. Pour l’instant, je suis encore trop concentrée sur mon travail. Je me focalise sur mes morceaux en essayant de proposer quelque chose de correct au public. Pour moi, une demande de collaboration doit découler d’un processus naturel. Je ne me retrouve absolument pas derrière ces rencontres un peu forcées, « officielles ». Je vois plutôt la complicité artistique comme le prolongement d’une relation amicale : quelque chose de simple et naturel.

Françoiz Breut • 23/10, 19.30, €13/16, Botanique, Koningsstraat 236 rue Royale, Sint-Joost-ten-Node/Saint-Josse-ten-Noode, 02-218.37.32, info@botanique.be, www.botanique.be

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