Quelle est l’odeur du désespoir ? Quel est le parfum de la chaleur humaine ? C’est ce que tente de mettre en images le Centre Belge de la BD avec son expo consacrée à la Sud-Coréenne Ancco.

Dès qu’on met le nez dehors, c’est plein de choses incompréhensibles ». C’est tout à fait ça, se dit-on, alors que nos plaies saignent toujours après une énième attaque brutale sur nos cœurs déjà meurtris. Ce n’est pourtant pas dans les rues de Bruxelles – où l’on tente de combler les pertes par un amour désespéré – que nous avons recueilli ces mots, mais dans les premières pages de la bande dessinée d’Ancco Mauvaises filles, publiée récemment chez l’éditeur français Cornélius et qui fait l’objet d’une petite exposition – ô combien bienvenue – au Centre Belge de la BD.

À la fin des années 90 la Corée du Sud sombre dans la crise économique. La jeune Jin-joo file un mauvais coton : elle fume, passe ses nuits dehors, exaspère ses profs et fait vivre un enfer à ses camarades. À la maison et à l’école, la violence est le seul langage d’application. Et lorsqu’elle trouve un peu de chaleur humaine auprès de la rebelle Jung-ae, elle prend la fuite avec elle. Le chemin de la liberté mène le duo dans un bar à hôtesses. L’abus les attend au tournant, la désolation est la seule mélodie audible. Pour Jin-joo c’est le catalyseur d’une vie meilleure, pour Jung-ae un point de non-retour.

Ce récit ne vous est pas raconté au Centre Belge de la BD (qui expose des dessins de l’album) mais nous voulons tout de même vous convaincre d’y faire un tour. Car mise à part l’histoire – à laquelle, en toute concision, nous n’avons pas fait assez honneur ici – Mauvaises filles explore de manière surprenante le fonctionnement de la mémoire, ce qu’elle retient et ce qu’elle abandonne aux méandres de l’oubli. Car Jin-joo est Ancco. À travers la fugue et le retour de Jin-joo, c’est sa propre histoire qu’Ancco raconte. Ses souvenirs brouillés et confus, elle les ordonne en mots et en images avec des odeurs du passé, tantôt suaves, tantôt douces-amères, qui ont réveillé sa mémoire. Et ça marche : des décors grisâtres mais d’une grande précision, des cadrages originaux et un noir envahissant qui nous ramènent à des parfums que nous connaissons tous, à des émotions que nous avons tous ressenties : un mix d’horreur et de réconfort qui comblent sans effort la distance entre ici et la Corée. On a mis le nez dehors, les choses restent en grande partie incompréhensibles. Mais on a aussi senti l’amour désespéré qui nous unit tous. Au moins, on sait qu’on n’est pas seul.

ANCCO: MAUVAISES FILLES ••••
> 11/4, Stripmuseum/Centre belge de la Bande Dessinée, www.stripmuseum.be, www.cbbd.be

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