Tardi met les pieds dans la mort

Gilles Bechet
© Agenda Magazine
11/09/2014
Nourri d’une documentation rigoureuse, Tardi restitue dans deux albums majeurs le cauchemar quotidien des poilus dans les tranchées. Deux albums qui se trouvent aujourd’hui au centre d’une exposition à Bozar.

Paul Tardi, grand-père du dessinateur, a vécu les horreurs de la Première Guerre mondiale. Il s’est embourbé dans les tranchées. Il a été blessé, gazé, mais ne l’a jamais raconté à son petit-fils. Il ne parlait pas de la Grande Boucherie. Qui pouvait comprendre ? C’est de sa grand-mère que Jacques a appris toutes les misères que la folie de la guerre a imposées à cet homme qui était si gentil. Cet affrontement barbare, traumatisme fondateur du XXe siècle, a hanté l’œuvre de Tardi dès ses débuts. Ce n’est que quelques décennies plus tard, alors qu’il possédait la maîtrise de son art, qu’il a abordé 14-18 de manière frontale. Dans Putain de guerre !, un récit chronologique suit, vignette après vignette, le quotidien sans illusions d’un ouvrier tourneur de la rue des Panoyaux envoyé au front. Dans C’était la guerre des tranchées, il reprend la narration B.D. pour de courts récits qui transpirent la peur, la mort, la cervelle écrasée et la boue. Ces deux albums (sortis chez Casterman) forment l’essentiel de l’expo inaugurée à Angoulême et présentée à Bruxelles pour deux mois. Les grands faits d’armes et les stratégies militaires n’intéressent pas Tardi. Ce qui le touche, l’émeut et le terrorise en même temps, c’est le quotidien des poilus, leurs réflexes de survie face au feu ennemi et à l’intérieur d’un groupe d’hommes qu’il n’ont pas choisis. Tardi dessine tout ça avec un détachement empathique à hauteur d’homme dans des cases panoramiques.
Une des belles surprises de l’exposition, c’est de voir les originaux de Putain de guerre ! repris dans leur intégralité, impeccablement alignés sur les murs comme des petits soldats. Dans leur fin cadre noir, chaque dessin se dédouble dans sa version au trait noir et avec l’original de la mise en couleur à l’aquarelle. Une petite déception : l’absence à côté de ses illustrations des chansons de l’album CD Des lendemains qui saignent où sa femme Dominique Grange a repris et réarrangé des chansons de la Grande Guerre. Côté audiovisuel, on peut suivre sur un petit moniteur un long entretien avec Tardi dans lequel il décortique son obsession pour 14-18.

TARDI ET LA GRANDE GUERRE > 23/11, €2/4, di/ma/Tu > zo/di/Su 10 > 18.00 (do/je/Th 10 > 21.00), Bozar, rue Ravensteinstraat 23, Brussel/Bruxelles, 02-507.82.00, www.bozar.be

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