KFDA: Léa Drouet : poétique d’une gare

Estelle Spoto
© Agenda Magazine
05/05/2015
(© Ivan Put)

Un pied dans le théâtre, un pied dans les arts plastiques et un pied dans la musique, Derailment de Léa Drouet est une forme composite qui investit pour trois soirs la gare de Bruxelles-Congrès dans le but de changer notre regard sur ce qui nous entoure.

Traditionnellement, c’est le texte qui se trouve au centre de la création d’un spectacle, tout en haut de la pyramide. Ensuite viennent les acteurs, et puis le texte et les acteurs sont mis en valeur par la lumière, le son, la scénographie. J’ai une vision plus horizontale des choses : pour moi, ces différentes composantes ont la même valeur, elles se trouvent au même niveau », explique Léa Drouet, Lyonnaise établie à Bruxelles depuis 9 ans et formée à l’Insas. « À l’école, je me suis rapidement retrouvée à sortir de la salle de spectacle, à investir les couloirs par exemple. La salle de spectacle, c’est une boîte noire, comme une page blanche où il faut tout créer. Moi j’aime partir de quelque chose qui existe. Et puis je pense qu’on trouve plus de liberté quand on crée dans des lieux dont on n’a pas l’habitude, parce qu’alors on ne rentre pas dans des schémas tout faits ».

C’est pour cela que, pour Derailment, tu as choisi la gare de Bruxelles-Congrès ?
Léa Drouet : Oui, je voulais que ce ne soit pas un lieu habituel pour moi. Mais c’est aussi parce que la gare porte en elle une sorte de symbole du passage, du déplacement. La gare de Bruxelles-Congrès est une gare où beaucoup de trains passent mais où peu s’arrêtent. Pour la petite histoire, c’est aussi la tour où est renouvelé l’air des tunnels entre la gare du Midi et la gare du Nord. C’est pour cela qu’il y a pas mal de courants d’air. C’était une belle occasion de poétiser ce lieu, de partir d’un lieu réel qui porte déjà en lui quelque chose de poétique.

Le changement, c’est le thème de ce spectacle-performance ?
Drouet : Le point de départ, c’est la théorie du philosophe grec Épicure, qui a pensé le monde des atomes. Selon lui, les atomes étaient des éléments qui tombaient les uns parallèlement aux autres de haut en bas, comme une pluie. Il fallait qu’il y en ait un qui dévie de sa trajectoire et vienne percuter un autre atome pour créer de la matière. Épicure s’est basé là-dessus pour parler de la liberté humaine. Ce qui m’intéressait dans cette théorie, c’est comment il est nécessaire que quelque chose dévie de sa trajectoire pour produire quelque chose de nouveau. C’est une métaphore qui peut s’appliquer dans les relations intimes, sociales...

Tu collabores avec plusieurs artistes sur ce projet...
Drouet :Derailment se compose de trois parties intégrant une vingtaine de participants, professionnels et amateurs, et pour chacune de ces parties, j’ai invité d’autres artistes. Clément Vercelletto est un musicien qui travaille sur la spatialisation sonore. Il va diriger une espèce de chœur de magnétophones à cassettes mobiles. Jean-Philippe Gross et Arnaud Paquotte évoluent dans un protocole de concert mais déplacé d’une salle traditionnelle. Ils vont agir sur le lieu avec la musique. Pour la troisième partie, le plasticien et performeur Frédéric Bernier, qui développe une dynamique de détournement et expérimente une forme de nouveaux rituels avec des objets usuels, a travaillé sur les journaux gratuits disponibles dans la gare. Matthieu Ferry se charge de donner une unité à l’ensemble avec la lumière et crée un environnement propice à la sensation. Mon rôle, c’est de mettre en scène tout ça.

Qu’attends-tu du public ?
Drouet : La poésie de l’image et du son permettent de créer des espaces de projection suffisants pour que le public – qui est debout et libre de se déplacer dans la gare – puisse se raconterson histoire. Je ne veux pas prendre le spectateur par la main mais j’ai quand même le souhait qu’il y ait une sorte de plaisir à voir qu’on peut se saisir de quelque chose de son environnement, le prendre en charge collectivement et en faire quelque chose d’autre. Il y a un potentiel d’amusement dans les éléments usuels qui nous entourent. On peut en faire autre chose que ce qu’on nous propose. J’ai envie de partager ça.

DERAILMENT
22 > 25/5, Station Brussel-Congres/Gare de Bruxelles-Congrès, www.kfda.be


KUNSTENFESTIVALDESARTS
8 > 30/5, verschillende locaties/divers endroits/various locations, www.kfda.be

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