Cannes : instantané du septième art

Niels Ruëll
© Agenda Magazine
13/05/2015
À Cannes, lors des onze prochains jours, seront présentés en avant-première les films qui épiceront les salles de ciné les prochains mois. Qu’est-ce que cette 68e édition du festival a dans le ventre ? Pour quels Bruxellois les enjeux sont-ils particulièrement importants ?

Nous sommes là pour mettre en valeur les nouvelles écritures, les nouvelles formes, les nouvelles inventions visuelles de l’époque. Le Festival est une sorte de photographie, à la fois éphémère et durable, quand on additionne les années, de ce qu’est l’Art du Cinéma ». C’est ainsi que Thierry Frémaux, son directeur, décrit la mission du Festival de Cannes. Le responsable de la sélection a manifestement été sensible à la critique qui soulignait le nombre limité de femmes réalisatrices ces dernières années. Lors de cette édition, l’actrice américaine Natalie Portman présente son premier film en tant que réalisatrice, A Tale of Love and Darkness. La Corée, le Japon et l’Iran ont aussi une délégation de réalisatrices, mais c’est surtout la France qui y envoie ses filles. Maïwenn essaiera d’égaler le succès de Polisse avec Mon roi, l’histoire d’une femme qui se remet d’un sérieux accident de ski et des tumultes de l’amour.
(Carol)

Le rôle principal a été confié à Emmanuelle Bercot, qui a écrit le scénario de Polisse. Avec son propre film, le socialement engagé La tête haute, elle a l’honneur d’ouvrir le festival. Valérie Donzelli s’est saisie d’un scénario qui a traîné longtemps dans un des tiroirs de François Truffaut. Alice Winocour a elle tourné un thriller sur un soldat d’élite souffrant de trouble de stress post-traumatique, interprété par la star flamande Matthias Schoenaerts.

Best of mondial
The Lobster du Grec Yorgos Lanthimos s’inscrit, selon Frémaux, dans la tradition de ces films qu’on ne peut pas comprendre tout à fait mais qui sont à la fois fascinants, mystérieux et inventifs. On attend une controverse autour du film hongrois Son of Saul. László Nemes, un élève de l’icône du slow cinema Béla Tarr, y raconte l’histoire d’une prison dans le camp de concentration d’Auschwitz. Aux côtés des jeunes talents, on croisera de solides têtes d’affiche. Après une longue absence, le Taïwanais Hou Hsiao-hsien revient avec The Assassin (avant-première : 27/5, UGC De Brouckère). La Cinematek lui consacre une rétrospective le mois prochain.
(La giovinezza)

Le nouveau film de Paolo Sorrentino après le très apprécié La grande bellezza s’appelle La giovinezza, « La jeunesse », probablement un titre ironique puisque le rôle principal revient à Michael Caine. Gus Van Sant, grand habitué de Cannes, a filmé Matthew McConaughey et Ken Watanabe dans une forêt du Japon. Pour Il racconto dei racconti, Matteo Garrone (Gomorra) s’est basé sur des récits folkloriques vieux de 400 ans de Giambattista Basile. Jacques Audiard espère retenir la Palme d’or en France avec Dheepan, un film sur un soldat du Sri Lanka qui se retrouve à Paris. Le Japonais Hirozaku Kore-eda (Nobody Knows, Still Walking, I Wish) fournit depuis 20 ans des perles plus raffinées les unes que les autres, logiquement, il devrait un jour ou l’autre décrocher la Palme. Cette année, il tente sa chance avec Notre petite sœur, basé sur un manga. Quant aux amateurs de romantisme, ils attendent avec impatience Carol, de l’Américain Todd Haynes avec Cate Blanchett et Rooney Mara.

Dieu est un Molenbeekois
Pour plusieurs Bruxellois, cette année est plus palpitante que les autres. Laurent Capelluto apparaît dans Je suis un soldat, un film français en compétition officielle. Marc Zinga, qui a remporté cette année le Magritte du meilleur espoir avec son interprétation de footballeur africain dans Les Rayures du zèbre, poursuit son ascension. On le verra dans le Deephan d’Audiard. Jérémie Renier endosse le rôle principal de Ni le ciel, ni la terre, repris dans le festival parallèle La Semaine de la Critique. Le film parle de soldats français qui disparaissent mystérieusement dans une région soi-disant sûre d’Afghanistan. Dans la sélection de courts métrages, on retrouve Waves ’98 du réalisateur libanais installé à Bruxelles Ely Dagher et Het paradijs de Laura Vandewynckel, qui a réalisé ce film d’animation socio-critique en tant qu’étudiante au Rits.
(Ni le ciel, ni la terre)

Mais aucun Bruxellois ne sera plus sous le feu des projecteurs que Jaco Van Dormael. Son quatrième film, Le Tout Nouveau Testament, est invité pour la Quinzaine des Réalisateurs, le festival parallèle qui a lancé les carrières de Ken Loach, Werner Herzog, Jim Jarmusch, Michael Haneke et bien d’autres. La Quinzaine a aussi été le tremplin de Van Dormael puisque c’est là que son premier film a été présenté en première mondiale en 1991 : Toto le héros a séduit tout le monde et a finalement remporté la Caméra d’or. Van Dormael a conçu le scénario de ce Tout Nouveau Testament avec l’écrivain bruxellois Thomas Gunzig. Le point de départ est que Dieu existe bel et bien. Il vit à Molenbeek et est ignoble avec sa femme et sa fille. Pour se venger, celle-ci poste toutes les dates de décès des hommes sur Internet.
(Le Tout Nouveau Testament)

Ce qui fout un beau bordel. Pour rectifier le tir, elle engage six nouveaux apôtres. Pas vraiment des enfants de chœur mais de magnifiques losers comme un tueur qui n’assassine que des fourmis et des souris blanches ou un petit garçon qui aimerait bien devenir une fille. Benoît Poelvoorde incarne le Dieu molenbeekois, et Yolande Moreau, sa femme. Le casting réunit aussi Catherine Deneuve, François Damiens et les acteurs flamands Laura Verlinden, Johan Leysen et Viviane De Muynck. « J’ai essayé de faire quelque chose de drôle et d’émouvant. J’avais envie de quelque chose de très belge, un conte surréaliste qui se passe dans la ville où je vis : Bruxelles, avec son mélange de langues, de cultures, d’accents », déclare Van Dormael, en train de mettre la dernière main au film. Début juin, la Cinematek reprend partiellement la programmation de la Quinzaine.

Film d’ouverture du Festival de Cannes: La tête haute
La quinzaine des réalisateurs
3 > 5/6, Cinematek, www.cinematek.be
Rétrospective Hou Hsiao-hsien
1/6 > 31/7, Cinematek, www.cinematek.be

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