Philippe Claudel : artiste double face

Patrick Jordens
© Agenda Magazine
25/01/2014
Écrivain acclamé, Philippe Claudel fait depuis quelque temps également fureur en tant que cinéaste 
talentueux. Alors que son dernier film Avant l’hiver est sorti récemment en salles, Claudel vient en personne à Bozar pour parler de sa double vie artistique.

Les amateurs de littérature le connaissent surtout pour des perles comme Les Âmes grises, La petite fille de Monsieur Linh ou L’Enquête. Claudel a écrit une œuvre impressionnante qui comprend une trentaine de romans et de nouvelles plusieurs fois récompensés. Mais depuis quelques années, il troque régulièrement la solitude de la table de l’écrivain pour l’agitation d’un plateau de tournage.
Un amour né sur le tard ? Philippe Claudel :
« Absolument pas ! Outre la littérature, j’ai étudié le cinéma à Nancy et j’ai depuis flirté aussi plusieurs fois avec le septième art, surtout comme scénariste mais aussi comme réalisateur de courts métrages, etc. Mais c’est vrai que j’ai osé mon premier long métrage à un âge avancé. Je peux faire les choses seulement si j’ai le sentiment de disposer d’un bagage humain et technique suffisant. C’est finalement à 37 ans que je me suis profilé comme un auteur professionnel alors qu’enfant, j’étais toujours en train d’imaginer des histoires. Peut-être que je suis simplement quelqu’un qui se développe tardivement. »

Comment et quand sentez-vous qu’une histoire ou un sujet demande une forme cinématographique plutôt que littéraire ?
Claudel : Ça se passe de manière très intuitive. Prenez le cas de mon dernier film, Avant l’hiver, qui tourne principalement autour du non-dit. Le thème des choses qui restent inexprimées, le silence, l’impossibilité de communiquer, cela ne se prête pas si facilement à l’écriture d’un livre. La caméra est alors un instrument magnifique pour se concentrer sur l’expression silencieuse des acteurs et sur l’absence marquante de la langue. Le cinéma me permet de suivre des pistes que je peux moins facilement explorer dans mes livres. En ce qui me concerne, ces deux formes artistiques sont parfaitement complémentaires. Et en plus elles ne sont pas liées entre elles. Je ne ferai par exemple jamais une adaptation au cinéma d’un de mes livres.

Pourquoi pas ?
Claudel : Justement parce que je considère mes livres comme des objets littéraires et je ne vois pas ce qu’une adaptation cinématographique pourrait y apporter. Ce serait une grosse bêtise.

Malgré les différences formelles, on découvre quand même des points communs au niveau du contenu. Peut-on dire que l’élément de « suspense », ou du « secret », revient souvent dans votre travail ?
Claudel : Oui, on peut appeler ça « le secret », ou plus largement « le mystère propre à l’humain ». Ces côtés sombres qui parfois, individuellement ou collectivement, peuvent mener à des actes terribles, tragiques. Je crois en effet que nous ne connaissons jamais totalement « l’autre », qu’il s’agisse d’un individu, d’une famille ou de toute une nation… Certaines choses restent toujours un peu cachées, aussi en nous-mêmes. C’est quelque chose qui me fascine beaucoup en tant qu’artiste.

Allez-vous désormais vous consacrer plus au cinéma qu’à l’écriture ?

Claudel : Non, je travaille d’ailleurs sur un nouveau roman. C’est vrai que j’ai l’impression de vouloir explorer encore plus ce qui concerne le septième art. Mais ce ne sera jamais entièrement aux dépens de mon amour pour la littérature.

(Photo © David Balick)

PHILIPPE CLAUDEL • 30/1, 20.00, €6/8, Bozar, rue Ravensteinstraat 23, Brussel/Bruxelles, 02-507.82.00, www.bozar.be

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