Brussels Jazz Marathon : traditions et innovations

Georges Tonla Briquet
© Agenda Magazine
21/05/2014
Le pianiste néerlandais Rembrandt Frerichs est l’un des rares musiciens internationaux accueillis sur l’une des scènes du Brussels Jazz Marathon. Le fait qu’il livre sur son nouvel album une solide dose de jazz transcendant les styles n’y est pas étranger, tout comme sa réputation de performeur polyvalent.

Un style fluide, une promo soignée et une présentation élégante contribuent incontestablement au succès. Rembrandt Frerichs en est bien conscient. Mais il s’agit évidemment d’abord et avant tout de musique et sur ce plan-là aussi, ce sympathique Néerlandais est au sommet. Il était par exemple récemment invité à Bruxelles pour un concert avec le Brussels Philharmonic. En collaboration avec le fabriquant de pianos Maene, il développe pour l’instant un projet particulier, The Contemporary Forte Piano, pour donner à Bach une nouvelle dimension. Et sur son dernier album, il laisse entendre avec subtilité ce que ses voyages en Orient et son séjour de deux ans au Caire ont provoqué. Bref, Frerichs est toujours en quête de nouveaux défis. Ce qui rend aussi les choses passionnantes pour son public.

Pourquoi êtes-vous devenu pianiste de jazz ?
Rembrandt Frerichs : À 15 ans, j’ai entendu Herbie Hancock et j’ai tout de suite été conquis. Je suis parti étudier à New York et je me suis ensuite installé à Den Haag, qui étaient encore à l’époque un vrai bastion pour les jazzmen. Pour l’instant toutefois, je me sens de plus en plus attiré par le classique tandis que je remarque juste le mouvement contraire chez mes étudiants. Il y en a beaucoup qui passent du classique au jazz. Il y a dix ans, je n’aurais certainement jamais pensé développer un jour un programme autour du piano-forte ou partager la scène avec un orchestre classique. Qui sait où je serai dans dix ans ? Mon nouvel album, par exemple, n’aurait jamais vu le jour si je n’avais pas voyagé ou vécu un moment en Égypte. De cette façon, ça reste intéressant, même s’il y a pas mal de points d’interrogation quant au futur.

Dans le dossier de presse, on lit que vous êtes un pianiste avec « une large perspective, qui est familier avec la tradition américaine du jazz mais qui évite les sentiers battus ».
Frerichs : De mes 18 à mes 28 ans, j’ai joué du jazz pur basé sur les standards et le swing. Ça s’entend clairement sur mes premiers albums, qui étaient plus tournés vers l’Amérique. Aujourd’hui, j’ai 36 ans et les choses peuvent être un peu différentes, même si je ne renie rien. Je cherche de nouvelles influences, mais j’aime toujours écouter Elvin Jones ou John Coltrane. Ma musique est toutefois davantage tournée vers l’Europe et imprégnée d’influences orientales.

C’est quand même une évolution normale vu que vous êtes européen et que nous sommes ici plus ouverts aux influences extérieures...
Frerichs : Lorsque je jouais à New York, je le sentais aussi. Avec The Real Book (un recueil de chansons américaines connues de tous qui sont jouées en jazz, NDLR), il y a en jeu tout un arrière-plan culturel que nous n’avons pas ici. Ma femme, qui est chanteuses classique, porte en elle l’œuvre de Bach et d’autres compositeurs apparentés. C’est notre bagage culturel à nous et on ne peut rien y changer. Quand un batteur américain joue du be-bop ou du swing, ça sonne mieux, c’est comme ça. Je suis entre-temps arrivé à cette constatation. C’est ce qui explique que j’opte aujourd’hui pour mes propres traditions et que je laisse de la place à mes intuitions artistiques personnelles. C’était déjà clair sur mon album précédent, Levantasy, et encore un peu plus avec Continental. Aujourd’hui, je suis en plein travail pour le projet Forte Piano. Je ne sais pas encore tout à fait dans quelle direction ça va aller, classique ou un croisement avec le contemporain, ou plus jazz. Je trouverais ça oppressant de devoir déjà le décider. On doit garder le stimulus de l’inattendu, aussi pour les auditeurs. C’est une mission en laquelle je crois : apporter quelque chose d’intéressant au public de façon à ce que les gens se décollent de leur télé ou de leur iPad.

Rembrandt Frerichs Trio 23/5, 18.30, Grote Markt/Grand-Place



4 ÉTAPES DU MARATHON

Trio Free Three
24/5, 16.00, Luxemburgplein/place du Luxembourg
Tout comme le jazz lui-même, le Jazz Marathon est en constante évolution. Ainsi, cette année, il y aura une toute nouvelle scène en plein air et ceci en plein cœur du quartier européen. Parmi une série de noms internationaux figure un super trio franco-belge tout neuf : un de nos voisins du sud, le guitariste Serge Lazarevitch (Joe Lovano), accompagné par un excellent bassiste de nos contrées, Nic Thys, et un batteur hors pair bien de chez nous, Teun Verbruggen. Ils présenteront en primeur les morceaux d’un album qui sortira dans le courant de l’année.


Wofo Sextette
24/5, 20.30, Petit Théâtre Mercelis
Le Wofo Sextette, groupe formé autour de Xavier Verhelst et dont font notamment partie deux membres de Flat Earth Society (Michel Mast et Jon Birdsong), collectionne les morceaux authentiques marqués par les inflexions les plus abstraites. En bref, du jazz avec un grain de folie. Pas étonnant donc que pour leur nouveau projet ils se soient plongés dans le monde de l’inventeur, artiste sonore et musicien Raymond Scott (1908-1994), qui avait son propre ensemble jazz mais qui a aussi livré des bandes-sons pour les dessins animés de Bugs Bunny.


Fiorini-Houben Quartet
25/5, 15.00, Grote Markt/Grand-Place
Avec la patience et la prudence d’apiculteurs, le pianiste Fabian Fiorini et le trompettiste Greg Houben ont entrepris sur l’album Bees and Bumblebees une quête de nouvelles structures mélodiques et harmoniques, tout en respectant la tradition. Avec pour résultat un voyage cinématographique à travers l’histoire du jazz. Des sons chaleureux à la Chet Baker (la marque de fabrique d’Houben) alternent avec le pointillisme et les accents plus tranchants de Fiorini, tandis que les influences latinos et les lignes mélodiques fluides servent de fil rouge.


Jazz Marathon Jam
25/5, 19.30, Bonnefooi
On peut recevoir un beau bagage technique à l’académie ou au conservatoire, mais l’école qui colle le plus au terrain reste celle des jam-sessions. Le dimanche soir, on a rendez-vous au café jazz Bonnefooi pour une énorme jam dirigée par deux grands hommes de la scène belge. Le trompettiste Bart Maris (photo) a joué avec à peu près toutes les sommités européennes de la scène impro tandis que le batteur Giovanni Barcella a veillé pendant des années au bon déroulement des jams à El Negocito à Gand. Du jazz sur le fil du rasoir.


BRUSSELS JAZZ MARATHON • 23 > 25/5, gratis/gratuit/free, VERSCHILLENDE LOCATIES/DIVERS lieux/VARIOUS VENUES, www.brusselsjazzmarathon.be

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