Interview

K.ZIA : ‘Je suis continuellement en quête de nouveaux horizons’

Nicolas Alsteen
© BRUZZ
11/02/2022
Disciple de Lauryn Hill, d’Erykah Badu ou d’Alicia Keys, K.ZIA façonne une musique à son image : plurielle et sans complexe.

Héritière d'une vedette internationale, véritable graine de star, K.ZIA nous ouvre les portes de Genesis, un premier album aux multiples vertus. Entre soul et RnB, beautés chantées en anglais et impulsions servies en français, l'artiste s'invente un monde à part.

K.ZIA est la fille de Zap Mama et ne s'en cache pas. Placé aux avant-postes de Genesis, le timbre envoûtant de Marie Daulne est d'ailleurs samplé sur le joli 'Coco'. Clin d'œil familial ('Take Me Coco' est le premier single publié par Zap Mama en 1991, NDLR), mais aussi passage de témoin, le morceau en question tire un trait d'union entre passé et présent, respect des traditions et péchés mignons de la génération actuelle : RnB, trap, soul, dancehall, chanson, pop et reggaeton fusionnent ainsi au cœur d'un premier album guidé par une voix d'ange. Disciple de Lauryn Hill, d'Erykah Badu ou d'Alicia Keys, K.ZIA façonne une musique à son image : plurielle et sans complexe.

Vous habitez actuellement à Berlin. Pourquoi avoir déménagé en Allemagne ?
K.ZIA :
Depuis toujours, ma vie se déroule entre Bruxelles et ailleurs. Quand j'étais petite, ma famille a déménagé à New York. Nous y avons vécu pendant quelques années. Durant mon adolescence, je suis partie en France. Puis, dans le cadre de mes études supérieures, j'ai eu l'opportunité de faire un Erasmus à Istanbul, une ville dans laquelle j'ai lié de nombreuses amitiés. Après un an passé en Turquie, mes potes et moi avons pris la direction de Berlin qui, pour beaucoup d'entre nous, se situait au carrefour des chemins. Tous ces déplacements rythment mes habitudes et mon quotidien.
Je suis continuellement en quête de nouveaux horizons. Récemment, je suis tombée sous le charme de Dakar, la capitale du Sénégal. Je m'y sens comme à la maison. Cela peut sonner comme un cliché, mais j'ai coutume de me présenter comme une citoyenne du monde. D'ailleurs, quand les gens me demandent d'où je viens, je n'apporte jamais une réponse limpide... Je suis née à Bruxelles, mais ma personnalité s'est construite au fil d'expériences à l'étranger.

Votre maman, Marie Daulne, est le cœur, l'âme et la voix de Zap Mama. Au début des années nonante, son projet a jeté les bases de l'expression "world music". Avez-vous de l'empathie pour cette appellation ?
K.ZIA :
Pas vraiment. C'est un terme restrictif qui, par essence, dissimule toute la diversité des styles qui traversent la planète. À mon sens, la chanson française, la soul ou le jazz sont autant des musiques du monde que la cumbia, la rumba ou la bossa-nova. J'associe la notion de "world music" à une vision colonialiste de l'industrie musicale. C'est un point de vue typiquement occidental et, finalement, assez excluant. On pourrait très bien classer les musiques en fonction de leur continent d'origine, par exemple. Mais ranger toutes les sonorités venues d'ailleurs sous l'étiquette "world music", ça n'a pas de sens. Je m'interroge aussi sur la signification de "musique urbaine". Mes chansons sont souvent logées à cette enseigne. Pourtant, ça ne veut rien dire... Si je devais poser des mots sur mon travail, je parlerais plutôt de soul et de RnB, avec des entrées vers la chanson française, le hip-hop, le dancehall et le reggaeton. Avec ça, certains médias seront peut-être tentés de m'associer à la "world music". (Rires)

Je suis née à Bruxelles, mais ma personnalité s’est construite au fil d’expériences à l’étranger

K.ZIA

Grandir au contact d'une maman chanteuse, est-ce le chemin le plus court pour marcher sur ses traces ?
K.ZIA :
Dans ma famille, personne ne m'a incité à suivre cette voie plutôt qu'une autre. Pendant longtemps, mon père a même cherché à me préserver, en insistant sur l'imprévisibilité des professions artistiques. En ce qui concerne les éventuelles comparaisons avec la musique de Zap Mama, je suis très à l'aise. Car nos styles sont diamétralement opposés. Pour moi, la carrière de ma mère est avant tout une incroyable source d'inspiration.

Avant de publier votre premier album, vous avez obtenu un diplôme en relations publiques et médias. Celui-ci facilite-t-il votre rapport à la presse ?
K.ZIA :
Je ne suis pas sûre que cela renforce ma visibilité médiatique. En revanche, il s'agit d'un atout. Car j'ai deux cartes à jouer. D'un côté, il y a la musique et tous les aspects artistiques. D'un autre côté, je suis responsable marketing de ma propre image de marque. Ma formation m'aide certainement à mieux cerner les valeurs et l'identité de mon projet artistique. D'autant que j'ai aussi engrangé des connaissances en graphisme, en vidéo ou en photographie. Via mes études, j'ai également été confrontée aux pratiques des radios et des médias électroniques. J'ai réalisé mon site internet, mon premier presskit ou les pochettes de mes singles.

Votre premier album s'appelle Genesis. Quelle signification attribuez-vous à ce mot ?
K.ZIA :
Après avoir traversé l'enfance et l'adolescence, c'est le point de départ de mon expression en tant que femme. Genesis marque aussi les prémices d'une vision artistique plus globale. Avant, je sortais des singles par-ci, par-là. Désormais, je propose un tout cohérent et réfléchi.

Sur cet album, les chansons se partagent entre le français et l'anglais. Est-ce un parti pris artistique ou une forme d'indécision ?
K.ZIA :
Il s'agit d'une esthétique assumée. C'est aussi les deux facettes de ma personnalité. Quand j'écris en anglais, il y a une partie de moi, plus rentre-dedans, qui ne s'exprime pas complètement. Comme je ne pouvais plus contenir cette rage, ce feu, je me suis mise à composer des titres en français. Chanter dans les deux langues, c'est une façon d'explorer des sonorités différentes, mais aussi l'expression de ma personne. Parce que mon style de vie et mes interactions sociales sont inextricablement liés au contexte linguistique. L'anglais et le français me représentent dans mon entièreté.

Comment gérez-vous la cohabitation de ces deux formes d'expression ?
K.ZIA :
Pour me faciliter la tâche, j'ai imaginé deux alter ego. Sur ce premier album, on croise donc K. ZIA et ZIA. Cette dernière s'exprime en français sur des sons très pop, rap ou dancehall. C'est une personnalité hargneuse, sexy, impulsive et plutôt individualiste. Au contraire, K.ZIA est une femme bienveillante, patiente et sensuelle. Elle s'affirme davantage dans des sonorités RnB. K.ZIA et ZIA se situent parfois aux antipodes. Ces personnages aux caractères antinomiques me permettent d'associer le yin et le yang, de me présenter telle que je suis vraiment.

K.ZIA: GENESIS
Sortie de l’album: 11/2, www.k-zia.com

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