Ascanio Celestino: Discours à La Nation

Gilles Bechet
© Agenda Magazine
19/04/2013
(© Antonio Gomez Garcia)

Le jeune comédien David Murgia interprète magistralement des textes du dramaturge et comédien italien Ascanio Celestini. Dans un langage poétique à l’humour ravageur, il multiplie les récits pour rendre compte de la violence des rapports de pouvoir dans un monde globalisé.
Conteur hors pair et citoyen engagé, l’italien Ascanio Celestini a pour la première fois créé un spectacle qu’il ne jouera pas. Ecrit et adapté en français avec la complicité de Patrick Bebi et du comédien David Murgia, Discours à la nation est un texte hilarant et féroce qui entremêle récits quotidiens, métaphores poétiques et parole des dominants pour démonter les discours qui noyautent l’économie et le quotidien d’un monde globalisé.

De quoi sont nés ces textes ?
Ascanio Celestini : Ils sont en lien avec l’actualité mais pas avec des événements particuliers. C’est plus une relation avec le langage que j’utilise tel qu’il apparaît dans les rapports avec le pouvoir et dans les rapports de pouvoir. Ça part souvent d’improvisations. C’est une écriture très orale. A travers l’improvisation et la répétition, je cherche à faire émerger du sens, du contenu.

Qu’est-ce qui vous a décidé à travailler en français avec David Murgia ?
Celestini : C’est une proposition de Jean-Louis Collinet du Théatre de la Place. Avant d’arriver à un spectacle, je voulais faire un travail de laboratoire. Au mois de juin, on s’est rencontré en Italie et j’ai commencé à mettre à sa disposition une série de récits et, petit à petit, on a construit tout le texte, mais ce texte s’est construit à partir de lui et d’éléments du contexte belge, tant et si bien que pour la version italienne que je jouerai en avril, je ferai d’autres récits et ce sera une structure différente de la version française.

Travailler sur le discours du pouvoir, c’est mettre en avant une violence qui se transmet par le langage et ses formules ?
Celestini : Oui, absolument. C’est une violence qui s’exprime souvent à travers une transformation du langage. Les hutus ont exterminé un million de tutsis qu’ils avaient assimilés à des cafards et c’est par cette transformation linguistique que le génocide a été possible. Certains ont avancé que la lutte des classes était dépassée, ce qui semble loin d’être le cas.
Si la perception de ces luttes de classes est beaucoup moins aiguë que par le passé, ça ne veut pas dire que le conflit n’existe plus. Aujourd’hui, les vraies classes subalternes sont assez loin de nous. Ce sont celles qui marchent 20 km. pour avoir accès à l’eau potable. La lutte de classes se mène avec des personnes qu’on ne visualise même plus.

Votre langage peut être très poétique. Est-ce une manière de se tenir à distance de la réalité,
d’être à la fois dedans et dehors ?
Celestini : On ne peut pas échapper à la réalité, nous vivons dedans. L’artiste doit capter l’attention du spectateur. Pour cela, il doit donner la possibilité de voir les choses d’un autre point de vue. Le surréalisme ou l’abstraction proposent aussi d’autres regards sur la réalité.

Sur scène, le comédien est accompagné d’un guitariste, quel est son rôle ?
Celestini : La musique met à disposition de l’acteur une espèce de tessiture, non seulement musicale, mais aussi dramaturgique, lui permettant de mieux gérer sa propre dynamique par le ton, le rythme et le volume de la voix. En prenant appui sur cette tessiture musicale, l’acteur paradoxalement devient plus libre.

Qu’attendez-vous de votre théâtre ?
Celestini : Je ne crois pas que le théâtre doit nécessairement donner un message politique, mais il peut aborder des questions très concrètes en suggérant d’autres points de vue, sur la réalité.

Asciano Celestini: Discours à La Nation • 23/4 > 4/5, 20.30, €10/15/19, théâtre national, boulevard E. Jacqmainlaan 111-115, Brussel/Bruxelles, 02-203.53.03, location@theatrenational.be, www.theatrenational.be

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