Isabelle Pousseur : le songe d’une nuit africaine

Catherine Makereel
© Agenda Magazine
13/02/2015
Créé au festival Les Récréâtrales, en octobre dernier, à Ouagadougou, L’odeur des arbres de Koffi Kwahulé plante ses racines dans une tragédie africaine très contemporaine. Isabelle Pousseur en signe la mise en scène et rapatrie à l’Océan Nord cette fable sur l’argent et le pouvoir.

L’odeur des arbres déploie aujourd’hui ses ramures à l’Océan Nord mais ses racines sont bien plus longues et souterraines. En 2003, Isabelle Pousseur rencontre Koffi Kwahulé et Etienne Minoungou, auteur et acteur de Bintou, pièce qu’elle accueille dans son théâtre. Très vite, tous les trois se retrouvent régulièrement aux Récréâtrales de Ouagadougou, lieu de création et de transmission du Burkina Faso. Au fil du temps, la metteuse en scène belge se pique du virus africain jusqu’à créer, en 2012, Le Songe d’une nuit d’été de Shakespeare au National avec une distribution africaine. À présent, l’exploration se poursuit avec L’odeur des arbres, une commande qu’elle a passée à Koffi Kwahulé, passionnée par le regard complexe de cet exilé sur l’Afrique. L’auteur sera d’ailleurs invité à rencontrer le public le 18 février.

Que raconte cette Odeur des arbres ?
Isabelle Pousseur : Une femme, Shaïne, revient dans sa ville pour enquêter sur la disparition de son père. Depuis son départ, la ville, qui sortait d’une sécheresse et d’une famine graves, a pu s’enrichir grâce au passage d’une route reliant différentes régions. On comprend que le père, qui ne voulait pas vendre sa maison située sur le tracé de la route, a été tué. Shaïne va enquêter auprès de trois personnes : sa sœur, qui travaille aujourd’hui dans la justice, son ancien amoureux devenu bourgmestre de la ville et son frère qui a tout vu du meurtre du père mais ne veut rien dire.

En quoi est-ce une fable africaine ?
Pousseur : La ville porte un nom imaginaire qui fait penser à l’Afrique de l’Ouest. Au début de la pièce, il est aussi question de Chinois qui veulent acheter un lac asséché en bordure de la ville et y construire une marina avec des hôtels de luxe. Dans cette pièce, il est surtout question des sacrifices qu’on est prêt à faire pour s’enrichir. C’est à la fois une enquête et une tragédie. L’auteur ne prend pas parti mais installe une crise familiale aiguë, avec notamment le frère qui a tout vu mais dont on a acheté le silence.

À Ouagadougou, la pièce s’est créée dans la rue ?
Pousseur : Depuis six ans, les Récréâtrales investissent une rue d’un quartier populaire et certains spectacles se jouent dans la cour des habitants. Nous nous sommes installés dans une de ces cours, sur un terrain avec quelques cases autour. On a vécu là quatre semaines. On répétait en soirée et ces gens, qui n’avaient pas l’électricité, nous voyaient arriver avec nos projecteurs. C’était exceptionnel pour eux d’avoir de la lumière jusque minuit. Ils vaquaient à leurs occupations pendant qu’on travaillait. Ce décor a aidé à évoquer des traces du passé plus pauvre de la pièce, avant que la ville s’enrichisse. À l’Océan Nord, on n’aura pas ce décor mais on va essayer de projeter des images de là-bas, de mettre de la terre sur le plateau et, pour le reste, le spectateur pourra faire un effort d’imagination, comme disait Shakespeare dans ses prologues, et imaginer le ciel étoilé au-dessus des têtes.

L’ODEUR DES ARBRES • 17 > 28/2, 20.00 (wo/me/We: 19.30), €7,50/12, Théâtre Océan Nord, rue Vandeweyerstraat 63-65, Schaarbeek/Schaerbeek, 02-216.75.55, www.oceannord.org

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