La Virevolte : Nancy Huston à la scène

Estelle Spoto
© Agenda Magazine
27/02/2013
(© Beata Szparagowska)

Dans La Virevolte, roman de l’écrivain franco-canadienne Nancy Huston, une femme choisit de sacrifier sa famille à sa passion pour la danse. Isabelle Jonniaux porte cette histoire secouante à la scène en entremêlant mouvements et paroles, avec trois comédiens, une danseuse et une bande sonore faite de « rock distendu ».

« Je n’ai pas écrit un mot, j’ai totalement réutilisé l’écriture de Nancy Huston », explique Isabelle Jonniaux, qui signe à la fois l’adaptation et la mise en scène de La Virevolte. « Je voulais vraiment rester proche de l’œuvre. Mais le roman compte 200 pages et j’en ai fait un spectacle d’une heure. Il a fallu extraire des espèces de tableaux, que je mets les uns à côté des autres et qui suivent la chronologie de l’histoire ».

Qu’est-ce qui vous a poussée à adapter ce roman ?
Isabelle Jonniaux : Il y a d’abord l’écriture de Nancy Huston. Elle arrive à croquer la nature humaine de manière très charnelle, très intime. L’histoire de ce roman en particulier m’a touchée personnellement. Tout tourne autour d’une femme, Lin, qui est danseuse et qui devient mère. La Virevolte aborde la difficulté de combiner la maternité avec un besoin d’existence autre. Qu’est-ce que je suis prête à sacrifier pour aller jusqu’au bout de mon épanouissement ? Elle, elle sacrifie sa famille. On suit le parcours de cette mère, du père et des deux filles qui vont grandir en l’absence d’un repère maternel, qui vont devenir adultes en composant avec cette absence-là. Et puis il y avait le thème de la danse. Ça m’intéressait de travailler sur le croisement entre la danse et le théâtre, entre la parole et le corps, de voir comment ces deux langages-là peuvent coexister. Il y avait une écriture théâtrale à inventer à partir de cette écriture littéraire.

Vous avez donc travaillé avec des comédiens et une danseuse, Johanne Saunier, de la compagnie Joji Inc.
Jonniaux : Les trois comédiens ont les mots, ils racontent l’histoire. En contrechamp, la mère, interprétée par Johanne, n’a que le corps pour s’exprimer. Je voulais voir comment les mots influencent le mouvement, comment le mouvement complète les mots et, par rapport à la danse, comment ces mots pouvaient « se mettre dans le corps » sans que ce ne soit illustratif. La danse et la parole se rencontrent à des endroits de narration. L’une et l’autre existent en complémentarité. Parfois, on arrête la parole parce que la danse raconte mieux que les mots. Parfois, on a besoin de quelques mots pour compléter la danse. En tout cas, le spectacle reste un objet théâtral parce que le récit est le moteur.
Vous comprenez la réaction de Lin ?
Jonniaux : Si Lin reste avec ses filles, elle est incomplète. Sans ses filles, elle est aussi incomplète parce qu’elle se coupe de la maternité. C’est vrai que c’est un cas extrême, mais il permet de faire réfléchir. Je n’abandonnerai jamais mes enfants, mais je peux comprendre. Je pense que chaque femme a un peu ces pulsions-là en elle. La société considère que tant qu’on n’a pas été mère, on ne s’est pas réalisée complètement, on n’a pas été jusqu’au bout de ce que son organisme permet. Il y a vraiment une pression et une espèce de culpabilité à être une vraie mère, une bonne mère, alors qu’on n’est pas toutes pareilles. La force du roman, c’est de poser cette situation, sans jugement.

Comment interprétez-vous le titre, La Virevolte ?
Jonniaux : Pour moi, il y a cette idée de retournement et surtout d’un être en déséquilibre. Un être en mouvement perpétuel, qui ne sait pas s’ancrer à un endroit. Lin a besoin de ce mouvement perpétuel pour exister. Pour ce personnage-là, à mon avis, l’arrêt signifie la mort.

La Virevolte • > 2/3, 20.00, €8/12, Centre culturel Jacques Franck, chée de Waterloostwg. 94, Sint-Gillis/Saint-Gilles, www.lejacquesfranck.be & 5 > 9, 12 > 16/3, 20.30 (5/3: rencontre avec Nancy Huston), €10/15/18, Atelier 210, Sint-Pieterssteenweg 210 chaussée Saint-Pierre, Etterbeek, www.atelier210.be

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