Martine Wijckaert : la parole de l’enfer

Gilles Bechet
© Agenda Magazine
22/01/2014
(© Hichem Dahes)

Pour son retour à l’écriture et à la scène de la Balsa, Martine Wijckaert revient aux figures de la mythologie familiale déjà approchées dans la trilogie Table des matières. Trois variations autour de personnages de femmes, la mère, la fille et la petite-fille, qui échangent leur vérités intérieures pour parler du sentiment de légitimité et de la place qu’on a au monde. Trois figures de l’enfer, dans ce qu’il peut avoir de plus intime et de plus universel.

Ça s’appelle Trilogie de l’enfer et ça parle d’amour ?
Martine Wijckaert : La vie sur terre est incomplète sans la présence du néant et de l’enfer. Parler de l’amour en niant la mort n’a pas beaucoup de sens et parler de la mort sans sa négation dans l’amour n’a pas beaucoup de sens non plus. L’amour se construit, il n’est pas inné. Ce n’est pas une valeur intrinsèquement humaine. On n’est pas particulièrement doué pour cette expérience comme on n’est pas nécessairement doué pour l’exercice de la vie quand on naît.

Comment avez-vous travaillé le texte avec vos comédiennes ?
Wijckaert : J’ai apporté quelque chose d’extrêmement écrit. C’est aux comédiennes d’arriver avec leurs propres propositions et de transcender le texte. L’acteur est le second écrivain, il est l’archéologue et l’architecte, il doit rentrer dans l’écriture et retourner à ses fondements pour en ressortir avec du sens. Il n’y a pas d’improvisation, il y a de l’obsession.

Ce spectacle est construit sur la parole mais, sur scène, il s’inscrit dans la durée grâce à un dispositif qui fait appel à la peinture et aux images vidéo ?
Wijckaert : Sur scène, les mots et le verbe se manifestent comme des couleurs sur la palette d’un peintre. La peinture est une grande inspiration pour sa capacité à travailler l’espace comme une séquence narrative. Je suis partie d’une perspective gothique, avec la mère dans son castelet, pour arriver à une mise en abîme dans l’infini, qui se dissout dans le chaos et la non résolution. Quant aux images vidéo, ce sont des éléments extrêmement minimalistes qui se déploient comme des images mentales rythmées par le texte. Il n’y a pas d’écran de projection. Avec une même économie d’éléments, je travaille l’apparition et le surgissement d’images évanescentes.

Qu’avez-vous envie de déclencher ?
Wijckaert : On ne sait jamais ce qu’on veut susciter. Le spectateur fait son histoire. Ce qui m’intéresse, c’est le lien qu’un spectateur va tisser avec les autres spectateurs pour réverbérer son humanité. Le théâtre est cette chose mystérieuse, un peu archaïque, qui permet aux gens de se rassembler pendant une heure et demie pour interroger leur propre humanité. Le rituel du théâtre est lié à un rendez-vous éphémère impossible à reproduire. Ce qui reste d’un spectacle n’est pas maîtrisable. C’est le produit d’une rencontre de la scène collective et de l’espace individuel dans un moment de vie unique. Les traces qu’elle peut laisser chez tout un chacun sont précieuses et tout à fait singulières.

TRILOGIE DE L’ENFER 24/1 > 15/2, wo/me/We > za/sa/Sa, 20.30, €4/6/8/12/14, Théâtre de la Balsamine, avenue F. Marchallaan 1, Schaarbeek/Schaerbeek, 02-735.64.68, www.balsamine.be

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