Plongée dans une 
humanité démunie

Catherine Makereel
© Agenda Magazine
20/02/2015
(© Isabelle De Beir)

Il y a quinze ans, Lorent Wanson créait Les Ambassadeurs de l’ombre avec des familles du quart-monde. Un spectacle d’une vive émotion, non pas parce que les comédiens parlaient de pauvreté, mais parce qu’ils parlaient, tout simplement, la tête haute. Aujourd’hui, la filiation paraît naturelle avec sa création des Bas-Fonds de l’écrivain russe Maxime Gorki, plongée dans une humanité démunie, humiliée. Wanson, qui aime se frotter au plus près de la vie, s’immerge à nouveau dans ce thème de l’exclusion, tristement actuel, mais cette fois avec la troupe du Théâtre en Liberté.

Peut-on faire un lien avec Les Ambassadeurs de l’ombre, que vous aviez mis en scène sur le même thème de l’exclusion ?
Lorent Wanson : Oui, il y a un lien évident. La force de Gorki ici, c’est qu’il vient de ce milieu-là. Il parle de ce qu’il connaît. Mais il s’agit aussi d’une grande pièce de théâtre du XXe siècle. Tchekhov lui-même l’a écrit. Cette fois, je travaille avec une compagnie, le Théâtre en Liberté. Rien que cet aspect de troupe raconte quelque chose sur le fait de vivre ensemble. Je ne pouvais pas leur demander d’interpréter des pauvres. Cette expérience-là est difficilement représentable. De toute façon, c’est moins une pièce sur la pauvreté que sur l’être humain. Comme chez Tchekhov, le décor social est une façade pour parler du monde de façon existentielle. Même s’il s’agit de personnages qui vivent dans un extrême désœuvrement, Gorki aborde des questions plus philosophiques que politiques.

On voit souvent Les Bas-Fonds montée de façon naturaliste, parfois avec de vrais sans-abris. Vous faites le pari inverse ?
Wanson : La pièce est souvent montrée dans sa facette politique mais c’est une pièce plus complexe que cela. Bien sûr, elle dit qu’on ne peut pas laisser les gens vivre comme ça mais elle parle surtout du respect de soi et du respect des autres. Elle pose la question de l’homme et des mensonges qu’il se raconte pour continuer d’avancer même s’il n’a plus de perspectives. C’est presque une pièce préambule à En attendant Godot de Beckett, l’histoire de deux clodos qui s’interrogent sur le sens de la vie. Quel est le poids de notre présence sur terre ? C’est toute la force de Gorki : il ne fait pas la morale mais apporte un côté photographique et même ludique.

Le décor participe à cette approche photographique ?
Wanson : La scénographie porte un regard sur l’état de la société. On a effectué un « costumage » du théâtre. On l’a arrangé comme un théâtre troué, délabré, qui peut refléter l’état dans lequel on a laissé la culture ou l’éducation permanente, c’est-à-dire tout ce qui peut être porteur de perspectives pour les gens. Sur le plateau, le seul élément de décor, ce sont des matelas, comme on en croise partout à la Gare du Midi par exemple. Comme si ce théâtre désaffecté était devenu un lieu de refuge, comme peuvent l’être certaines églises. Le jeu avec les matelas raconte des états du monde différents.

LES BAS-FONDS 26/2 > 4/4, di/ma/Tu 19.00, wo/me/We > za/sa/Sa 20.15 (21/3: 19.00, 15 & 29/3: 16.00), €9 > 16,50, Théâtre de la place des Martyrs, Martelaarsplein 22 place des Martyrs, Brussel/Bruxelles, 02-223.32.08, www.theatredesmartyrs.be

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