Rien à signaler : secouez-vous !

Gilles Bechet
© Agenda Magazine
12/04/2013
Avec Rien à signaler, une pièce de Martin Crimp tendue comme un suspense d’Hitchcock, Georges Lini évoque l’indifférence et la dislocation du lien social.

Qu’est-ce qui vous a attiré dans ce texte ?
Georges Lini : C’est un texte qui parle de choses graves. Il évoque la maltraitance d’enfants sans en faire le thème principal, qui est celui de la lâcheté, de la faiblesse humaine. C’est la première fois que je tombe sur une pièce qui aborde le thème de la non-assistance. Ce qui est intéressant, c’est que l’auteur ne prend pas position. Il laisse le débat ouvert. J’ai aussi été séduit par la finesse très anglo-saxonne avec laquelle il traite le sujet. Avec une grande qualité d’écriture, tout est suggéré, rien n’est dit ni montré frontalement. L’auteur laisse au spectateur le soin d’imaginer et on sait bien qu’au final, l’imaginaire est toujours plus fort.

C’était une pièce faite pour vous ?
Lini : Elle est rangée depuis plusieurs années dans ma bibliothèque. Le rapport aux textes est assez inexplicable. Parfois, le coup de foudre est immédiat. Parfois, il y a comme une maturation qui s’opère en douceur. On vit avec et on en rêve. A partir du moment où l’on sait qu’on va le monter, les choses se mettent en place naturellement. Dans ce texte, j’ai croisé un des thèmes qui me travaillent : « On n’est pas des gens bien tous les jours ». C’est la nature humaine qui veut ça. Dès la première scène, on sait que ça se passera mal, mais c’est tout le reste qui m’intéresse. Les voisins ne sont pas de mauvaises personnes mais leurs comportements nous questionnent : Comment réagirions-nous, jusqu’où pourrions-nous laisser aller les choses avant d’agir ?

Comment avez-vous abordé la préparation de ce spectacle ?
Lini : Je monte les pièces pour ce qu’elles sont. Le matériau premier, ce sont les comédiens avec qui je travaille à défendre la pièce.
L’écriture des auteurs anglo-saxons a souvent la précision d’un scénario qui pourrait presque être filmé tel quel. Les acteurs ont du coup tendance à jouer petit. Moi je veux que ce soit du théâtre, on n’est pas au cinéma, le décor et la bande-son y participent, mais le plus important, c’est le travail des comédiens.

Vous êtes partisan d’un théâtre qui secoue, qu’entendez-vous par là ?
Lini : Il n’y a que l’art pour rendre compte de la brutalité du monde dans lequel on vit. Pour ça, il faut que l’art secoue. Être provocateur, c’est assez facile, on peut mettre les gens à poil et se taper contre les murs. Ça fera toujours réagir. La grande force de cette pièce, c’est sa violence cachée. C’est probablement l’un des textes les plus secouants et les plus bouleversants que j’aie montés jusqu’à présent. Je n’étais pas prédestiné à faire ce que je fais. J’ai commencé le théâtre tard, notamment grâce à un spectacle comme Incendies de Wajdi Mouawad, dont je suis sorti bouleversé. Après ça, ma vie est devenue un peu différente, comme si elle avait dévié de sa trajectoire. C’est ça que j’aimerais provoquer à mon tour.

Martin Crimp : Rien à signaler • 16/4 > 11/5, 20.30, €8/11/13/16, Théâtre De Poche, Gymnasiumweg 1A chemin du Gymnase, Brussel/Bruxelles (Terkamerenbos/Bois de la Cambre), 02-649.17.27, www.poche.be

Fijn dat je wil reageren. Wie reageert, gaat akkoord met onze huisregels. Hoe reageren via Disqus? Een woordje uitleg.

Read more about: Podium

Iets gezien in de stad? Meld het aan onze redactie

Site by wieni