Salvatore Calcagno : la vache et les prisonniers

Estelle Spoto
© Agenda Magazine
05/12/2014
(La Vecchia Vacca © Vincent Arbelet)

« Je travaille sur des choses très quotidiennes et sur les failles de ce quotidien », explique le tout jeune auteur et metteur en scène belgo-sicilien Salvatore Calcagno. Une femme qui prépare à manger pour son enfant dans La Vecchia Vacca ; des jeunes qui traînent sur une place dans Le garçon de la piscine. Du banal, de l’absurde, du sublime.

C’est ce qu’on appelle une « ascension fulgurante ». Salvatore Calcagno, né en 1990 à La Louvière dans une famille sicilienne, est sorti de l’Insas il y a deux ans. Invité par son professeur Armel Roussel pour une carte blanche, il livre sa première création en 2013, La Vecchia Vacca. Le spectacle décroche le Prix de la meilleure découverte aux Prix de la Critique et est programmé entre autres au festival Actoral à Marseille, au festival Impatience au 104 à Paris avant de poursuivre sa tournée qui passera notamment par Montréal cet hiver. La Vecchia Vacca est aujourd’hui repris aux Tanneurs, juste après la seconde création de Calcagno, aux parfums de soleil et de liberté, Le garçon de la piscine. « Ce qui me caractérise, c’est le lien entre la Belgique et le Sud », explique-t-il. « Tout est un aller-retour entre les deux ».

Cette nouvelle création se situe-t-elle dans la lignée de la première ? Quelles sont les principales différences ?
Salvatore Calcagno : Dans La Vecchia Vacca, il n’y a quasiment que des figures de femmes. C’est pour moi une ode à la femme, à la figure maternelle. Dans Le garçon, ce sont des figures plus jeunes, essentiellement des garçons. Mon premier spectacle est frontal, avec une narration rythmée et très claire du début à la fin alors que Le garçon est un spectacle à 360°, beaucoup plus étiré dans le temps. Je prends vraiment le temps de laisser vivre un coucher de soleil, un déplacement... C’est le portrait d’une place, c’est presque du documentaire. J’ai demandé aux comédiens de parler comme si c’était un micro-trottoir, comme s’il y avait une caméra devant eux. Donc le rapport au public est très étrange : ça joue sur la gêne, sur jusqu’où on peut aller dans l’intimité, et le fait de vouloir montrer en même temps ce qu’on vit à la caméra.

Cette place dont vous dressez le portrait existe-t-elle vraiment ?
Calcagno : Ça pourrait être la place de La Louvière, mais aussi la place de Pachino, en Sicile. Il y a des éléments des deux endroits. Les gens qui traînent là sont comme ces personnages de jeux vidéo qui butent sur quelque chose et qui n’arrivent plus à avancer. Pourquoi on reste ici ? Je trouve ça fascinant de retourner sur la place de La Louvière et de voir les mêmes personnes qu’il y a dix ans, toujours au même endroit. Il y a quelque chose de beau et de terrible là-dedans. On pense toujours qu’en allant voir ailleurs on va gagner en liberté alors qu’en fait, au final, on reste dans les mêmes questionnements.
(Le garçon de la piscine © Margaret Durow)

On sent chez vous une influence du cinéma italien. Qui vous inspire en particulier ?
Calcagno : J’aime Pasolini pour le regard qu’il pose sur les acteurs, la manière dont il filme les corps, et Fellini pour la folie qu’il amène. Mais pour moi, le plus grand, ça reste Visconti. Dans Mort à Venise, par exemple, il y a de nombreux plans qui sont des travellings à 360°, avec de formidables détails qui font que l’œil est toujours excité. C’est ça que j’essaie de faire dans mes spectacles. Mon travail est visuel, corporel, avec une grosse réflexion sur les rythmes mais aussi sur les couleurs, dans l’éclairage, dans la scénographie, dans les costumes, le maquillage. Je suis un obsédé des couleurs. La couleur me permet de rythmer le spectacle, d’aiguiser le regard, de mettre les corps en valeur. C’est vraiment une façon de mettre en lumière ce que je veux raconter. Depuis que je suis petit, j’ai une attention particulière pour les couleurs et le rythme des choses. Je pense que ça a été un gros défaut, c’est devenu un point fort.

LE GARÇON DE LA PISCINE • 9 > 13/12, 20.30 (10/12: 19.00) LA VECCHIA VACCA • 16 > 20/12, 20.30 (17/12: 19.00), €5/8/12, Théâtre Les Tanneurs, Huidevettersstraat 75-77 rue des Tanneurs, Brussel/Bruxelles, 02-512.17.84, www.lestanneurs.be

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