Dominique Blanc endosse la douleur de Duras

© Agenda Magazine
02/02/2012
(© Ros Ribas)

Dominique Blanc défend La Douleur de Marguerite Duras, mise en scène par Patrice Chéreau et Thierry Thieû Niang. Elle y campe l’auteur, brinquebalée entre espoir et peur. Celle de ne pas voir son amour, Robert Antelme, revenir de déportation à la fin de la guerre. Un texte renversant et une interprétation magistrale.

Molière de la meilleure comédienne pour ce rôle, Dominique Blanc (La reine Margot, Indochine...) évoque son coup de foudre pour les mots de Duras. « Vous lisez et votre corps entier est bouleversé, comme quand on tombe amoureux. Le cœur qui s’emballe, la chair de poule, la respiration qui s’accélère... On prend conscience d’être face à l’exceptionnel. C’est instinctif et presque animal. Pas raisonné ou intellectuel. Quelque chose prend feu ».
D’où vient cette force?
Dominique Blanc: C’est une tragédie contemporaine. La barbarie nazie n’est hélas pas si loin. Elle peut se reproduire. Les moments de férocité, comme en Syrie actuellement, le montrent. Il y a aussi l’envie de mémoire, de surtout ne jamais oublier. C’est le texte d’une femme, amoureuse, qui résiste à travers l’attente. Résister comme Duras a pu le faire face à la mort annoncée de son mari à la fin de la guerre. Elle s’est battue alors que plus personne n’y croyait. Une force d’amour incroyable. Sa traversée insensée m’a plu. Non pas la traversée des apparences mais la traversée des profondeurs.
Duras parle de solitude. À quel point celle-ci vous touche en tant que comédienne?
Blanc: Je l’aime beaucoup. C’est un état auquel il vaut mieux s’habituer. Quand on met au monde, on est toute seule. Quand on meurt aussi. Il faut l’apprivoiser. Je n’avais pas pensé être seule sur scène. C’est venu avec l’envie de lire ce texte. J’ai alors demandé à Patrice Chéreau de le mettre en scène.
Comment définiriez-vous la complicité qui vous unit?
Blanc: C’est le premier à m’avoir choisie comme comédienne dans un cadre professionnel. Ce premier regard, on ne peut l’oublier. Il m’inspire, j’ai confiance en lui, j’aime sa rigueur et j’admire son travail. Ensemble on produit de belles choses. Cette complicité s’est bâtie au fil des années. Mine de rien, cela fait 30 ans !
La pièce nécessite un engagement total. N’est-ce pas parfois épuisant?
Blanc: Je l’ai jouée beaucoup mais pas un soir je n’ai manqué d’envie d’y aller. Parfois j’étais plus fatiguée, je me suis demandée si j’allais y arriver, mais j’ai toujours le même enthousiasme. C’est sidérant. Patrice, Thierry Thieû Niang et moi tendions vers ce rêve de monter ce texte avec rien car il n’y avait pas d’argent au départ. Ni pour le décor ni pour les costumes. Il fallait tout faire avec rien. Par les temps qui courent, cette économie m’a beaucoup plu. J’aime arriver au théâtre et choisir une table, une chaise. Parfois on demande une chaise au café et s’il n’y en a pas, on demande au curé qu’il nous prête une chaise de l’église.
Cette douleur-là vous est devenue vitale?
Blanc: J’aimerais y revenir tous les trois-quatre ans, en l’améliorant. Elle est atemporelle et vaut un grand texte de Sophocle, Racine ou Corneille. Tout y est. Je ne sais pas où je serai dans 100 ans, mais j’aime l’idée d’être sur les routes avec mon amoureux pour défendre ce texte.

La douleur
3 & 4/2 • 20.30, €13,50/15,30/18 (FR met NL boventitels)
Paleis voor Schone Kunsten/Palais des Beaux-Arts rue Ravensteinstraat 23, Brussel/Bruxelles,
02-507.82.00, info@bozar.be, www.bozar.be

Fijn dat je wil reageren. Wie reageert, gaat akkoord met onze huisregels. Hoe reageren via Disqus? Een woordje uitleg.

Read more about: Podium

Iets gezien in de stad? Meld het aan onze redactie

Site by wieni