Interview

Laurence Bibot: ‘Je ne pense pas que je retournerai sur scène’

Gilles Bechet
© BRUZZ
02/12/2021
1778 LAURENCE BIBOT

Laurence Bibot a écrit et réalisé le podcast 'Zéro Mort'. Avec cette comédie d’anticipation, l’autrice et comédienne nous plonge dans un monde qui résonne étrangement avec le nôtre.

Certains la connaissent comme la maman d'Angèle et de Roméo Elvis, d'autres comme la partenaire du chanteur Marka, mais Laurence Bibot est d'abord une comédienne, autrice et humoriste aux talents multiples. C'est maintenant en podcast qu'elle partage sa verve et sa fantaisie.

Nous sommes à Bruxelles, en décembre 2059. L'année se conclut avec l'absence de décès, grâce au "tube", une invention qui prolonge la vie des vieux. La reine Yvonne s'apprête à souhaiter en son nom et en celui de son épouse, la reine Monique, une belle année à tous ses concitoyennes et concitoyens. C'est ainsi que débute Zéro Mort, un podcast, écrit et réalisé par Laurence Bibot. Avec cette comédie d'anticipation, l'autrice et comédienne nous plonge dans un monde qui résonne étrangement avec le nôtre. Les plus de soixante ans sont appelés à passer une visite annuelle d'entubage, alors qu'un mystérieux groupe, les VV, pour Voleurs de Vie prennent la défense des jeunes à qui il ne reste plus que des miettes et qui commencent à se faire zigouiller par des vieux égarés.

L'idée de cette série dérive d'un monde esquissé dans un "Café serré" sur les ondes de La Première il y a cinq ans. "C'était l'époque où on commençait à beaucoup parler de transhumanisme. Je n'étais pas enchantée par cette perspective. Dans un monde où les gens ne meurent plus et où l'on reste plus longtemps en vie et en bonne santé, ce sont alors les plus vieux qui trustent les places. Ce qui est un peu paradoxal quand on prend en compte le discours permanent qui promeut le jeunisme."

Laurence Bibot

  • 1968, naissance à Bruxelles
  • 1989-92, interprète Miss Bricola dans Plus ou Moins Net avec Les Snuls sur Canal +
  • 1990, signe son solo La Velue, en collaboration avec Mireille Verboomen
  • 1995, interprète Bravo Martine!, écrit avec Nathalie Uffner
  • 1999, crée Miss B, toujours avec Nathalie Uffner
  • 2005, tourne le film documentaire Travestis avec Marka
  • 2011, commence les « Café serré » sur La Première
  • 2018, crée son one woman show Bibot Distinguée
  • 2020, Studio Madame, ses capsules play-back extraites des archives de la Sonuma sont exposées au Musée de la Photographie de Charleroi

Si elle peut comprendre les similitudes que certains dégagent entre "entubage" et "vaccination", elle y voit plus un rapprochement de circonstance et un effet de vocabulaire. "Cette histoire est pour moi une manière de parler d'une société où il y a des poches de résistance face à des dérives des autorités, sauf qu'ici la résistance est plutôt du côté des gentils, elle est plutôt anti-réactionnaire. Je suis tous les jours surprise de ce que suscite la vaccination et je n'ai pas vu venir une telle résistance. Je suis vaccinée, mais si ça tombe, d'ici cinq, dix ou trente ans, un troisième bras va nous pousser au milieu du dos et les non-vaccinés diront : 'On vous l'avait bien dit'. En fait, on ne sait rien."

La plus grande distinction
Même si ce n'est pas encore, loin s'en faut, la vieillesse, la cinquantaine est au cœur de son deuxième stand up, Bibot Distinguée, qu'elle devrait conclure après de nombreux reports pour une dernière représentation au Cirque Royal en mai. "J'ai fait deux seuls en scène et avec ce dernier, je trouvais que j'étais arrivée à raconter pratiquement tout ce que je voulais, je ne pense pas en écrire un troisième et je ne pense pas que je retournerai sur scène. Je n'ai aucun manque de ce côté-là."

Elle ne devrait pas pour autant se tenir éloignée des micros des radios comme celui de France Inter où elle officie dans Par Jupiter, l'émission animée par Charline Vanhoenacker et Alex Vizorek. Elle y pratique son humour "à la belge", plein d'autodérision et de personnages féminins comme elle les aime, ridicules, mais attachants, et pas vraiment méchants. En vieille routière du micro, elle a appris à affûter sa plume qu'elle tourne sept fois dans sa bouche avant de nous faire rire.

"Je ne suis pas polémiqueuse et je ne m'intéresse pas beaucoup à la politique mais je fais désormais super attention à ce que je dis. Avant, tu faisais une chronique en radio et seuls les gens qui écoutent la radio entendaient ta chronique. Maintenant, ta chronique déborde sur d'autres supports et elle atteint parfois des gens qui ne sont pas censés aimer ce que tu fais. Je lis parfois des commentaires en me demandant pourquoi cette personne est allée écouter ce que je fais alors que ce n'est pas son truc. Quand j'étais plus jeune, il y avait en France cinq personnes qui faisaient de l'humour, tous des hommes blancs. Maintenant ça se diversifie et c'est super intéressant. Il y a différents sujets auxquels on m'a sensibilisée. Je trouve important d'y réfléchir et de les intégrer dans ce que j'écris."

Je suis vaccinée, mais si ça tombe, d’ici cinq, dix ou trente ans, un troisième bras va nous pousser au milieu du dos et les non-vaccinés diront : ‘On vous l’avait bien dit’

Laurence Bibot

Phénomène instagram
Beaucoup l'ont découverte sur Instagram où elle distille d'hilarantes petites capsules où elle fait des play-back de séquences piochées dans les archives de la RTB(F), où la ménagère liégeoise, la bourgeoise coincée succèdent à Amélie Nothomb ou Michel Polnareff. "Mon idée n'est pas de me moquer d'une personne, mais plutôt de créer un décalage amusant. D'après les réactions que je reçois, les gens le comprennent et c'est chouette de voir que certains relèvent des détails que je n'ai pas expliqués. Sans rien dire, on se comprend."

Si la scène ne va pas lui manquer, il reste un domaine qu'elle a encore envie d'explorer. En dehors de petits rôles dans des comédies comme Ma vie en rose, Je suis supporter du Standard ou dans la série Septième ciel, on ne l'a pas beaucoup vue sur les petits et grands écrans en Belgique et elle ne se l'explique pas vraiment. "Je pense que le monde du cinéma belge ne s'y retrouvait pas. Peut-être que mon image ne colle pas avec un cinéma qui est plutôt social. Ce n'est pas grave, je peux passer des castings en France où il y a plus de productions. Et je compte bien continuer à écrire et faire des podcasts" Jusqu'en 2059 ?

ZÉRO MORT
Disponible sur les plateformes de podcast et sur Auvio, www.rtbf.be/auvio

Iets gezien in de stad? Meld het aan onze redactie

Site by wieni