Anderlecht la Résistante (3): 'Sauver ces enfants, voilà ce qui comptait'

Frank Hoornaert
© BRUZZ
17/05/2022
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Bernard Fenerberg avait dix-sept ans lorsqu'il est entré dans la Résistance, le 20 mai 1943. "J'ai fait des choses dangereuses, mais sauver ces enfants, voilà ce qui comptait."

Pendant la Seconde Guerre Mondiale, quatorze fillettes juives étaient pourchassées par la police secrète allemande, la Gestapo. Grâce à l'intervention de Fenerberg, la Résistance a réussi à mettre les filles en sécurité. Elles ont toutes survécu à la guerre. Pour une des filles, Jeanine Poler, c'est un souvenir qui lui revient encore en mémoire chaque jour, même 80 ans après. Elle l'évoque dans le troisième épisode de 'Anderlecht la Résistante'.

Les origines de Fenerberg se situent partiellement dans l'Ukraine actuelle : son père Joseph est né dans la ville ukrainienne Drohobytsj, qui appartenait encore à la Pologne à ce moment-là. Son père et sa mère Rachel étaient des Juifs polonais qui ont quitté leur pays natal à un jeune âge et se sont rencontrés à Paris. Sa mère a fui vers la France suite aux pogroms antisémites en Pologne après la Première Guerre Mondiale, son père s'y est retrouvé après plusieurs détours - avant cela, il a travaillé dans les mines de Charleroi. Leur fils Bernard est aussi né à Paris, mais la famille a déménagé à Bruxelles lorsqu'il avait un an, et il a habité à Bruxelles toute sa vie.

À quatorze ans, il trouve du travail comme apprenti-fourreur. C'est à ce moment-là qu'a éclaté la Seconde Guerre Mondiale. En tant que famille juive - sa sœur Clara Fanny étant née quatre ans après lui - la situation des Fenerberg était bien entendu angoissante. "Début 1942, mon père a été mobilisé pour travailler dans une usine de ciment dans le nord de la France, pour la construction de l'Atlantikwall", explique Fenerberg. Il n'a jamais revu son père depuis. Après sa mobilisation en France, Joseph Fenerberg fut déporté vers le camp de concentration Auschwitz, où il est décédé.

Plus tard, en 1942, plusieurs razzias ont eu lieu à Bruxelles. Heureusement, la famille a pu en réchapper, mais il était clair que la situation devenait intenable. Ils ont décidé de se cacher. "Ma sœur s'est cachée dans un cloître à Heverlee, ma mère a été embauchée comme cuistot dans une famille noble, chez le comte et la comtesse d'Aspremont Lynden", explique Fenerberg. A seize ans, il a donc dû chercher sa propre voie. Il a demandé de l'aide au sous-prêtre de la paroisse Notre-Dame de la Conception Immaculée à Anderlecht, Jan Bruylandts, qui lui a trouvé un refuge. Via son bon ami Toby Cymberknopf, avec qui il travaillait comme fourreur, Fenerberg est entré en contact avec l'armée des partisans belges. À cette époque, il ne pouvait pas encore faire partie de la Résistance armée, car il n'avait pas encore dix-huit ans.

Mais comme il s'était distingué en mai 1943, Fenerberg a tout de même eu la possibilité de rejoindre la Résistance armée à dix-sept ans. Dans les mois qui suivaient, il a entre autres mis le feu à un champ de colza à Ruisbroek, pour éviter que l'armée allemande l'utilise. Lors d'autres opérations, il a entre autres volé des armes à des officiers allemands pour les donner à la Résistance, et il a recherché des balances comme le 'Gros Jacques'. Fenerberg est resté actif jusqu'au jour où, tout à coup, plus personne ne venait au lieu du rendez-vous et qu'il perde le contact avec la Résistance. Un peu avant, Paul Halter avait été emprisonné et déporté à Auschwitz. Il serait un des rares Belges à avoir survécu au camp de concentration, et il a collaboré à la création de la Fondation Auschwitz par la suite, dont il aura été président jusqu'à sa mort.

Peu après la libération de Bruxelles, en septembre 1944, Fenerberg a retrouvé sa mère et sa sœur. Plus tard, il a témoigné de ses expériences devant un grand public, entre autres dans des écoles, afin que les générations suivantes n'oublient pas tout ce qui s'est passé ici. "Même si ce n'est pas facile de faire comprendre tout ce qui s'est passé à des jeunes", dit Fenerberg. Il a donc finalement décidé d'écrire son histoire sous forme de livre : en 2013 est paru son livre autobiographique Ces enfants, ils ne les auront pas! – Récits de guerre et de résistant d'un ketje de Bruxelles.

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