Saskia Vanderstichele

'Vos maris, vos pères, vos amis, vos frères.... Ma clientèle n'est ni plus ni moins que le reflet de la société.' C'est ce qu'écrit La Morrigasm, travailleuse du sexe, dans une nouvelle chronique.

Je suis 'performeureuse érotique'. Dans les faits, je me déshabille sur scène devant des inconnus, que ce soit dans des cabarets, des nightclubs, des centres d'arts ou encore des stripclubs. La particularité de mon travail dans les stripclubs, a contrario des autres endroits, est que la prestation ne se limite pas qu'à l'aspect scénique mais concerne aussi – surtout – les services privés impliquant du contact physique avec les clients.

Lorsque des quidams apprennent la nature de mon métier, l'expression qui revient le plus souvent est « de vieux pervers » ou « les vieux dégueus » pour qualifier ma clientèle. Cette mention est généralement suivie d'une moue de dégoût et d'un air compatissant laissant entendre « Elle est bien courageuse ».

L'emploi systématique de l'adjectif 'vieux' m'interroge. Cette idée suppose deux présomptions.

Premièrement, qu'en devenant 'vieux' on devient 'repoussant'.

Deuxièmement, que j'ai besoin d'être attirée par mes clients pour faire mon travail. Ou du moins que si c'est le cas, c'est plus facile.

Ces deux idées sont fausses.

Qu'il soit vieux ou jeune, riche ou précaire, grand ou petit, gros ou mince, valide ou handicapé, noir ou blanc... .aucun de ces critères n'entre en compte pour déterminer la qualité d'un échange que j'aurais avec un client. Le critère primordial est le respect mutuel. Vient ensuite l'envie de passer un bon moment.


Mon travail en tant que professionnel.le est de faire vivre une parenthèse magique et hors du temps à celui qui le recherche et ce, peu importe d'où il vient car j'ai la conviction profonde que chacun mérite de recevoir un moment de soin

Mon travail en tant que professionnel.le est de faire vivre une parenthèse magique et hors du temps à celui qui le recherche et ce, peu importe d'où il vient car j'ai la conviction profonde que chacun mérite de recevoir un moment de soin. Que ce soin passe par la tendresse d'une étreinte ou le frisson de l'intensité d'une expérience érotique.

Quand au qualificatif 'pervers', oui, certains clients sont problématiques – j'y consacrerai une chronique à part entière - mais ce n'est pas le fait de visiter un.e travailleur.euse du sexe qui fait de vous un 'pervers'. Ma clientèle n'est ni plus ni moins que le reflet de la société en dehors. Ce sont vos maris, vos pères, vos amis et vos frères. On y trouve des businessmen esseulés en voyage d'affaire qui préfèrent venir converser avec nous plutôt que de rester seul dans leur chambre d'hôtel ou de risquer d'importuner quelqu'un dans un bar, des jeunes frappés de timidité qui viennent s'entraîner à parler aux femmes, des bandes d'amis d'enfance qui se réunissent pour l'anniversaire ou l'imminent mariage de l'un d'eux, des retraités divorcés qui ne se voient pas retourner sur le terrain de la rencontre amoureuse et qui préfèrent visiter des professionnelles, des fêtards dans l'ivresse de la nuit à la recherche d'un shoot d'adrénaline...

J'en ai trouvé certains insupportables. J'ai passé des bons moments sincères avec d'autres. Certains d'entre eux sont devenus des amis sur le long-terme.

Car en fin de compte, bien que les circonstances instaurent un échange d'argent, nous ne sommes que deux êtres humains qui se rencontrent.

Column La Morrigasme

De erotische performer, paaldansdocent en domina Le Morrigasme deelt om de twee weken een dagboekfragment. Daarin deelt die gedachten, die voortkomen uit hun omzwervingen in de wereld van sekswerk.

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